Pauline Marois met sur la glace l'idée de moderniser les dispositions anti-briseurs de grève du Code du travail, un projet qu'avait condamné son candidat-vedette Pierre Karl Péladeau.

La mesure ne fait pas partie de la plateforme électorale de la chef péquiste, mais elle est toujours dans le programme du parti. En conférence de presse samedi, Mme Marois a expliqué qu'elle a «établi des priorités» en matière de «protection des travailleurs» en vue d'un prochain mandat et que la modernisation des dispositions anti-briseurs de grève n'en fait pas partie.

Si elle est reportée au pouvoir, elle promet entre autres de «bonifier» les lois sur la santé et la sécurité au travail, de permettre aux travailleurs domestiques d'être couverts par la CSST et d'encadrer les agences de placement de personnel temporaire.

«Une fois que nous aurons abordé ces questions, nous pourrions aborder l'autre aspect du Code du travail qui concerne la loi anti-briseurs de grève. Ce n'est donc pas exclu, mais ce ne sera pas la priorité», a-t-elle soutenu.

«Sur un horizon de quatre ans», un gouvernement péquiste engagerait des «consultations auprès des partenaires syndicaux et patronaux quant à l'opportunité de procéder à la modernisation du Code du travail».

«Ça pourrait nous amener à réviser le Code du travail, mais je suis prudente à cet égard parce que nous avons quand même atteint un certain équilibre, a affirmé Pauline Marois. C'est vrai qu'il y a eu des conflits exacerbés à certains moments, mais de façon générale, on a beaucoup, beaucoup amélioré les relations de travail au Québec, toujours sous un gouvernement du Parti québécois.»

Or le PQ avait déposé en 2010, lorsqu'il était dans l'opposition, un projet de loi pour moderniser les dispositions anti-briseurs de grève. C'était au moment du lock-out au Journal de Montréal, propriété de Québecor dont le patron était Pierre Karl Péladeau.

En 2011, une consultation s'est tenue sur le sujet en commission parlementaire. M. Péladeau y avait participé. Il avait affirmé que le projet de loi péquiste «va pénaliser le Québec» et «faire en sorte d'effrayer les entreprises qui vont avoir de plus en plus de difficultés à pouvoir s'installer ici». «Ça va probablement précipiter la fermeture de nombreuses d'entre elles. Je ne veux pas être pessimiste, mais je suis inquiet, je suis très inquiet», disait-il.

Au terme des consultations, la commission parlementaire a recommandé de revoir la notion d'établissement et d'employeur pour «établir un juste équilibre du rapport de force entre les parties négociantes lors d'un conflit de travail». Rappelons que les dispositions anti-briseurs de grève ont été adoptées en 1977 et ne tiennent donc pas compte des changements liés aux nouvelles technologies. Ainsi, la loi prévoit qu'un briseur de grève est un tiers qui travaille dans les locaux mêmes d'une entreprise en conflit afin de remplacer les lock-outés ou grévistes.

L'an dernier, la ministre du Travail, Agnès Maltais, avait déclaré que si le gouvernement péquiste était majoritaire, elle déposerait un projet de loi semblable à celui de 2010 dans le cadre d'une refonte globale du Code du travail. Elle se disait en train de préparer des propositions mais qu'elle était réfractaire à les déposer dans le contexte d'un gouvernement minoritaire. Lorsqu'on lui a rappelé ces déclarations, Pauline Marois a réitéré que le dossier n'est pas une priorité.