Un gouvernement minoritaire risque de ne pas survivre longtemps, a prévenu François Legault cet après-midi en conférence de presse sur la Rive-Sud.

Le chef de la Coalition avenir Québec répète qu'il veut un gouvernement majoritaire. Les derniers sondages laissent toutefois entrevoir l'élection d'un gouvernement minoritaire du Parti québécois. M. Legault a indiqué qu'il ne serait pas patient dans l'opposition.

«Ne comptez pas sur moi pour vivre dans un gouvernement minoritaire pendant deux, trois ou quatre ans en défendant le statu quo. Si les deux vieux partis acceptent de faire le ménage dans la bureaucratie dans Hydro-Québec pour investir dans les écoles, donner un médecin de famille à chaque Québécois et être capable de réduire les impôts, on va s'entendre. Mais si les deux vieux partis continuent de défendre le statu quo, je ne serai pas patient», a-t-il lancé.

S'il est dans l'opposition, il a promis de prendre ces dossiers «un par un». Mais il n'hésitera pas à défaire le gouvernement lors du vote de confiance sur le prochain budget. «S'ils veulent travailler sur ces dossiers ou sur un de ces dossiers, on va collaborer. Mais s'ils ne veulent pas travailler, s'ils veulent juste défendre le statu quo, alors on aura des opportunités, probablement au printemps 2013 avec le prochain budget.»

Et si la montée de la CAQ se poursuit et lui permet de diriger un gouvernement minoritaire, M. Legault ne prévoit pas mettre beaucoup d'eau dans son vin. Il ira de l'avant avec ses réformes «prioritaires». «Je reviens en politique pour changer les choses, je n'irai pas cautionner le statu quo», a-t-il lancé.

Ne devrait-il pas tenir compte du verdict des citoyens, qui auront élu un gouvernement minoritaire? «Les gens ont juste un vote. On ne pourrait pas dire qu'ils s'arrangent pour avoir un gouvernement minoritaire», a-t-il répondu.

M. Legault croit que son principal ennemi n'est pas Jean Charest ou Pauline Marois. C'est le «cynisme» causé par les «vieux politiciens» qui n'ont pas rempli leurs promesses. «Mais moi, je vais livrer la marchandise», promet-il.

Deux souverainistes, dit Charest

Jean Charest a passé les derniers jours à dépeindre Pauline Marois et François Legault comme deux souverainistes en désaccord sur la date du référendum. Selon lui, les propos de M. Legault sur un possible gouvernement minoritaire lui donnent raison.

«Ça fait juste la démonstration d'une chose: M. Legault est un souverainiste qui ne va pas nier ses racines souverainistes, a affirmé le chef libéral. Il est en train de dire qu'il veut travailler avec Mme Marois.»

Le premier ministre sortant en a profité pour réitérer que, selon lui, «un vote pour la CAQ, c'est un vote pour le PQ».

Hydro-Québec: la CAQ changerait la loi

M. Legault a confirmé qu'il changerait la loi pour profiter des économies qu'il réaliserait à Hydro-Québec. Comme l'a démontré La Presse aujourd'hui, la majorité des réductions de dépenses ne serait pas versée au gouvernement. En vertu de la loi, la Régie de l'énergie les utiliserait plutôt pour diminuer la facture résidentielle d'électricité.

La CAQ modifierait la loi pour augmenter les tarifs d'électricité. Elle compenserait ainsi chaque baisse par une nouvelle hausse. Le prix final de la facture ne changerait pas. Mais le gouvernement pourrait récupérer les économies à Hydro-Québec pour financer ses promesses.

Rappelons par ailleurs que la CAQ appuie une mesure du budget libéral de 2010, qui annonçait le dégel du bloc patrimonial d'électricité à partir de 2014.

L'éducation, «priorité absolue»

Après des rencontres éditoriales avec des quotidiens, M. Legault a détaillé cet après-midi ses promesses en éducation. Il consacrerait 1 milliard $ à l'éducation primaire et secondaire et à la lutte au décrochage. «C'est au moins 10 fois plus que les deux vieux partis», a-t-il avancé.

L'éducation est sa «priorité absolue». «C'est une des raisons principales, sinon la raison principale, pour laquelle je reviens en politique», a-t-il insisté.

La CAQ créerait un Ordre professionnel pour les enseignants. Cet ordre se chargerait de leur formation et de la mise à jour de leurs connaissances.

Pour attirer les «meilleurs candidats», M. Legault veut augmenter leur salaire de 10% à 30%. Trois paramètres détermineraient ces augmentations. On payerait davantage les enseignants qui travaillent dans un milieu socioéconomique défavorisé. On payerait aussi plus ceux qui agissent à titre de mentor pour leurs collègues et ceux qui ont une formation académique plus poussée.

«Le salaire des enseignants ne sera pas fixé en fonction des résultats des élèves», a répété M. Legault, en accusant la Centrale des syndicats du Québec de propager cette idée.

Les enseignants seraient néanmoins évalués davantage. On diminuerait aussi leur mobilité. Ils signeraient des contrats pour rester dans le même établissement pendant trois à cinq ans. Il y a un problème de «roulement», croit M. Legault. Les enseignants avec plus d'ancienneté fuient les écoles de milieux plus défavorisés. Il veut assurer plus de stabilité à ces établissements.

M. Legault reconnaît que pour plusieurs enseignants, le salaire n'est pas le critère le plus important. Plusieurs lui ont dit que c'est en améliorant leurs conditions de travail qu'on attirera de meilleurs candidats. «Message reçu et entendu», a-t-il lancé.  D'ici cinq ans, il leur promet d'injecter 250 millions $ par année pour engager des spécialistes (orthopédagogues, psychoéducateurs, etc) dans les écoles. Comme la CAQ propose d'abolir les commissions scolaires, les établissements décideraient eux mêmes de leurs besoins particuliers pour ces professionnels.

M. Legault veut aussi prolonger les heures d'ouvertures des écoles secondaires. Elles fermeraient à 17h, et non à 15h30. Les enseignants ne seraient pas obligés de travailler plus longtemps. Ceux qui le feraient seraient payés en temps supplémentaire. Ce temps serait utilisé pour les activités culturelles et sportives ainsi que l'aide aux devoirs. Le coût total de cette mesure: 340 millions $, incluant 50 millions $ pour les activités culturelles.

- Avec Martin Croteau