La CAQ veut financer en partie ses promesses, qui seront à terme de 3,7 milliards $, en diminuant les dépenses d'Hydro-Québec de 600 millions $ par année. Elle promet d'économiser la moitié de cette somme en abolissant 4000 postes à la société d'État. L'autre moitié viendrait de la réduction des coûts des grands travaux.

Vérification faite, à moins de changer la loi, la CAQ ne pourrait utiliser tout l'argent épargné par ces abolitions de postes pour financer ses promesses. Hydro-Québec compte trois divisions: TransÉnergie, Distribution et Production. Les deux premières divisions sont assujetties à la Loi sur la Régie de l'énergie. On y trouve la majorité des postes. La division Production ne compte que pour 3749 des quelque 22 400 postes de la société d'État.

Selon la loi, Hydro-Québec doit justifier ses tarifs d'hydroélectricité chaque année devant la Régie. Si la société d'État coupe des postes, elle réduira ses dépenses, et donc son «revenu requis» pour produire l'électricité. La Régie lui demandera forcément de diminuer la facture des consommateurs résidentiels. Résultat: la grande majorité des économies en salaire ne permettrait pas à un gouvernement caquiste de financer ses promesses. À moins qu'il ne change la loi pour exiger que la Régie ne diminue pas les tarifs à cause de ces économies. Le gouvernement peut modifier les tarifs d'hydroélectricité par mesure législative. C'est ce qu'a fait le gouvernement libéral dans son budget de 2010, qui prévoit une hausse du bloc patrimonial à partir de 2014. Règle générale, on calcule qu'une hausse de la facture résidentielle d'électricité de 1% équivaut à 100 millions $ de plus par année pour Hydro-Québec.

L'échéancier semble aussi très serré. La CAQ veut profiter de «la chance historique» du départ à la retraite de 6000 employés d'Hydro-Québec d'ici 2018 pour abolir 4000 postes sans que personne ne perde son emploi. Mais dans son programme, la CAQ prévoit avoir réalisé ces économies d'ici 2015.

Épargner dans les travaux

L'autre moitié des réductions à Hydro-Québec viendrait des «achats» dans les travaux. La CAQ croit pouvoir profiter de l'effet Marteau, qui aurait permis à Montréal de payer de 20% à 30% de moins depuis une année. Ce sont ces mêmes constructeurs qui réalisent les grands projets de la société d'État, explique le parti.

Or, si Hydro-Québec épargne dans les travaux, seulement une partie des sommes économisées concernera les «achats» - par exemple, un pylône. Une autre part importante concernera les immobilisations pour les investissements. Contrairement aux achats de matériel, cette portion n'ira pas dans les frais d'exploitation, et ne modifiera donc pas le dividende versé au gouvernement. Cela signifie que ces économies des travaux ne pourraient pas non plus toutes servir à financer les promesses de la CAQ. Mais le parti de François Legault croit pouvoir réaliser pouvoir épargner 300 millions $ seulement dans les achats.

Qu'elles servent ou non à financer les dépenses, ces économies seraient-elles réalisables? M. Legault croit que oui. Il a précisé lundi sur quelles sources il s'appuie: la mise à jour d'une étude de l'Institut économique de Montréal qui suggérait de privatiser la société d'État et d'autres études que les auteurs veulent garder confidentielles, car elles ont été faites avec «des moyens limités», a-t-il expliqué.

La CAQ promet aussi de «faire le ménage» à Hydro-Québec en permettant au vérificateur général d'en vérifier les livres. On cite en exemple les contrats informatiques, pour lesquels il y a eu d'importants dépassements coûts dans près de la moitié des cas depuis 10 ans. Hydro-Québec s'est déjà objectée à ce mécanisme. Le ministre sortant des Ressources naturelles, Clément Gignac, s'inquiétait l'année dernière du manque de transparence de la société d'État.