Excédé par les scandales de corruption qui tournent autour du Parti libéral, le financier québécois Stephen Jarislowsky songe à voter pour la Coalition avenir Québec (CAQ). Dans une entrevue à La Presse Affaires, le milliardaire a dit hésiter entre ne pas voter du tout ou donner son vote à la formation de François Legault lors du scrutin du 4 septembre prochain.

«Le sort du Québec dépend d'une vision qui n'est ni celle des libéraux ni celle du Parti québécois», a-t-il dit.

Le chef de la CAQ, François Legault, a saisi la balle au bond, disant croire que les propos de Stephen Jarislowsky témoignent d'un vent de changement chez les entrepreneurs québécois.

«Traditionnellement, les gens d'affaires ont souvent appuyé le Parti libéral, a-t-il constaté avant de visiter une usine de Cascades à Notre-Dame-du-Bon-Conseil, dans le Centre-du-Québec. Mais là, ils voient que Jean Charest n'a pas livré la marchandise.»

C'est lors d'une entrevue à la radio de CBC, hier, que M. Jarislowsky a tenu les premiers propos sympathiques à la CAQ.

Invité par La Presse Affaires à préciser sa pensée, M. Jarislowsky a tiré à boulets rouges sur Jean Charest, l'accusant d'avoir été «faible» et d'avoir cédé aux groupes de pression, notamment les syndicats.

«M. Charest a été là pendant de longues années. Aujourd'hui, on regarde l'état de nos infrastructures, on regarde l'argent dépensé et les questions de gouvernance, on regarde les défusions sur l'île de Montréal, on regarde les émeutes des étudiants...Qu'est-ce qu'il a fait de bon?», demande-t-il.

Le Parti québécois ne trouve pas davantage grâce à ses yeux.

«Avec l'attitude qu'ils ont, ils vont chasser tout le monde ici, surtout les riches», a-t-il lancé, écorchant au passage les politiques linguistiques du Québec qui «découragent les gens de venir ici et nuisent aux affaires».

Celui qui occupe les fonctions de président du conseil et chef de la direction de la firme de placements Jarislowsky Fraser dit qu'il votera sur la base de deux critères: l'économie et les questions de gouvernance. Or, ce sont exactement les thèmes qu'a adoptés François Legault depuis le début de la campagne.

Le chef de la CAQ martèle que le Québec est passé du 4e au 9e rang des provinces canadiennes pour le revenu disponible. Il y voit la preuve que les politiques adoptées par le gouvernement Charest depuis 2003 ne font pas le travail.

«À un moment donné, d'entendre M. Bachand et M. Charest avoir un discours jovialiste en disant qu'on a mieux traversé la crise que n'importe qui d'autre sur la planète, c'est un peu ridicule, a déclaré M. Legault. Quand on est plus petit, on tombe de moins haut. Mais il reste qu'au net, aujourd'hui, le Québec est beaucoup moins riche par personne que les autres États en Amérique du Nord, et la situation ne s'est pas améliorée.»

«Regardez tous les problèmes de pots-de-vin, a lancé de son côté M. Jarislowsky. Moi, je suis du côté de celui qui a embauché quelqu'un qui peut mettre un terme à ça», a-t-il affirmé dans une allusion au candidat-vedette de la CAQ, Jacques Duchesneau.

«D'un côté vous avez des gens qui n'ont pas réussi, et de l'autre des gens qui peuvent réussir, a résumé

M. Jarislowsky. Je ne suis pas sûr qu'ils vont réussir, mais qu'est-ce que je peux faire d'autre que de prendre le choix qui me donne une chance, qui me donne de l'espoir?»

L'an dernier, Stephen Jarislowsky avait accepté de prendre la parole au congrès de l'Action démocratique, à Trois-Rivières, avant de se retirer.