La lutte à la corruption n'a pas toujours été hissée, comme c'est le cas aujourd'hui, au rang de priorité du chef de la CAQ François Legault.

Sa croisade en faveur d'un gouvernement qui laverait plus blanc que blanc peut sembler aussi spectaculaire que subite, quand on examine son parcours des deux dernières années, selon une recension faite par La Presse Canadienne, lundi.

S'il forme le prochain gouvernement, le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ) dit qu'il fera adopter en priorité sa «loi numéro un» visant à éliminer toute forme de corruption.

Or, il appert que cette préoccupation n'a pas toujours figuré au sommet des priorités de M. Legault, aux différentes étapes de création de son parti et de son programme. Et ce n'est pas ce qui a motivé son retour en politique en 2010.

Ce sont plutôt les ratés du système d'éducation qui ont poussé M. Legault, selon ses dires, à l'époque, à sortir de sa retraite pour explorer l'idée de fonder éventuellement un nouveau parti politique.

C'est autour de septembre 2010 que M. Legault a commencé à tester ses idées et ses appuis avec une vingtaine de personnes, dont l'homme d'affaires Charles Sirois, en vue de préparer un retour en politique active. Il s'est affairé alors à rédiger un manifeste, «texte fondateur» définissant ses priorités d'actions, et devant servir de base à un programme politique.

Le manifeste de huit pages paraît en février 2011 et ne traite pas de lutte à la corruption. M. Legault y cible plutôt quatre priorités, dont sa «priorité absolue», l'éducation.

Après l'éducation, viennent la santé (avec l'engagement d'un médecin de famille pour chaque Québécois), la promesse de créer «une économie de propriétaires» et la défense de la langue française. Voilà, à ses yeux, les champs d'action à privilégier pour «sortir le Québec de l'impasse».

Pourtant, en ce mois de février 2011, la question était au centre de l'actualité: la députée adéquiste Sylvie Roy, qui deviendrait plus tard caquiste, réclamait une commission d'enquête sur la construction depuis déjà près de deux ans, l'Unité permanente anticorruption (UPAC) venait d'être créée et l'Unité anticollusion (UAC) dirigée par le nouveau candidat caquiste Jacques Duchesneau était en marche depuis un an déjà, sur fond d'allégations de toutes sortes dans l'attribution de contrats gouvernementaux.

Dans les mois qui ont suivi, toujours en 2011, après la publication de son manifeste, M. Legault a effectué une tournée des régions du Québec pour tester ses idées.

Puis, son parti a été officiellement créé au début de novembre 2011, dès après la mise sur pied de la Commission Charbonneau chargée de faire la lumière sur toutes les allégations qui circulaient depuis des années sur l'industrie de la construction.

Quelques jours plus tard, le 14 novembre, M. Legault rend public son plan d'action. Aux quatre priorités déjà identifiées en février, il ajoute alors la lutte à la corruption, qui vient au cinquième et dernier rang de la liste de ses priorités.

Le plan d'action caquiste de novembre 2011 s'accompagne d'une série de 20 engagements. Les quatre premiers touchent la santé, les quatre suivants l'éducation. Du total, seulement deux touchent la lutte à la corruption, encore une fois les deux derniers sur la liste. La CAQ propose la création d'un poste de commissaire à l'intégrité publique, qui serait doté d'un mandat très vaste, et la révision des règles d'attribution de contrats publics.

Après la fusion avec l'ADQ, en janvier, le congrès de fondation du parti s'est tenu en avril dernier, à Victoriaville. Encore là, la question de l'intégrité ne semblait pas retenir en priorité l'attention des membres et de leur chef.

Durant le week-end, les membres devaient se prononcer sur un total de 59 propositions. Du total, une seule touchait la question de l'intégrité, et portait sur la création d'un poste de commissaire à l'éthique.