Le 17 mars 2013, Philippe Couillard prenait la tête du Parti libéral du Québec en déclarant que les Québécois doivent « reprendre l'initiative de (la) discussion » en vue de réintégrer la Constitution. Un an plus tard, jour pour jour, il déclare : « Je n'initierai pas de démarche constitutionnelle ».

Lundi, le chef libéral a été longuement questionné sur les propos qu'il tenait au moment de son élection comme chef du PLQ. Il cherche depuis samedi à évacuer le dossier constitutionnel de sa campagne alors qu'il y a un an, il en faisait un enjeu « important », bien que moins prioritaire que l'économie.

« Je ne peux pas concevoir que l'on puisse s'investir en politique québécoise et choisir le Canada sans le désir de voir le Québec réintégrer un jour la famille canadienne, disait-il le 17 mars 2013 devant les délégués libéraux réunis en congrès pour élire leur nouveau chef. On ne peut pas vouer à l'oubli un enjeu aussi fort sur le plan des symboles que l'absence de la signature du Québec au bas de la loi maîtresse du Canada. »

Il était clair sur ses intentions: « À nous, Québécois de toutes les origines, francophones et anglophones, de reprendre l'initiative de cette discussion. À nous de dire qui nous sommes, c'est dans l'intérêt du Québec autant que dans celui du Canada. »

Lundi, Philippe Couillard marchait sur des oeufs lorsqu'on lui a rappelé ces propos. Il s'est défendu d'avoir changé d'avis, même s'il dit aujourd'hui que ce ne sont pas les Québécois qui doivent reprendre l'initiative de nouvelles négociations pour réintégrer le Québec dans la constitution.

Cette réintégration du Québec dans la Constitution, «un jour, est-ce que c'est souhaitable ? Oui. Mais ça ne se présentera pas sous notre initiative. Ça va se présenter sous l'initiative des autres Canadiens », a affirmé Philippe Couillard en conférence de presse. Et il ne connaît « personne au Canada qui a le goût de reprendre les conversations constitutionnelles ».

Il a insisté : « Je n'initierai pas de démarche constitutionnelle ». « Il faut attendre que les circonstances s'y prêtent, on ne mettra pas le Québec dans une situation d'être affaiblie, dans une conversation qui n'avancera pas. Pour que cette conservation réussisse, il faut que ça vienne du reste du pays », a-t-il expliqué.

Il a ajouté que « ce n'est pas une priorité pour les Québécois ». « Le monde, ils ne me parlent pas de ça », mais plutôt d'enjeux économiques, a-t-il fait valoir. Du reste, « on n'est pas un peuple opprimé, assiégé, humilié malgré ce que le Parti québécois essaie de nous faire croire ».

Depuis l'entrée en scène du candidat péquiste Pierre Karl Péladeau la semaine dernière, la tournée électorale de Philippe Couillard a pris des airs de campagne référendaire. Le chef libéral accuse le Parti québécois de vouloir « détruire le Canada », ce qui l'a forcé à s'avancer sur l'enjeu constitutionnel lors de ses conférences de presse.

Vendredi, M. Couillard avait répondu qu'il interviendrait auprès de Justin Trudeau, d'autres chefs fédéraux et des premiers ministres provinciaux pour qu'ils acceptent que le caractère distinct du Québec soit reconnu dans la Constitution. Ce serait son « devoir comme premier ministre du Québec », disait-il. Or, le lendemain, le chef libéral corrigeait le tir et affirmait qu'il ne mettrait finalement pas lui-même le dossier sur la table dans le cadre de sa tournée du Canada qu'il compte faire au début d'un éventuel mandat. Il n'aborderait les demandes historiques du Québec que si on lui pose des questions sur le sujet. Il a considérablement modéré ses intentions.

Si une province ou Ottawa veut lancer des négociations constitutionnelles sur le Sénat ou les Premières nationales, par exemple, un gouvernement libéral exigerait que les demandes traditionnelles du Québec soient obligatoirement à l'ordre du jour pour y participer, selon Philippe Couillard. Il avait fait adopter cette position lors du conseil général de son parti, en octobre dernier.

Marois réagit

Le chef libéral recule sur un autre engagement, a accusé Mme Marois. «M. Couillard nous a dit depuis le début que ce serait sa priorité en entrant au gouvernement, d'aller faire le tour des provinces (...) Je vais le laisser se dépêtrer dans ses contradictions», a réagi la chef du Parti québécois (PQ). Elle lui demande aussi de préciser comment il consulterait les Québécois avant de signer la constitution. Selon elle, un référendum serait nécessaire.

- Avec Paul Journet