«J'ai étudié en génie forestier dans les années 80. Une vingtaine d'années - et plusieurs emplois- plus tard, ma carrière ayant pris une direction qui ne me plaisait plus, je m'inscris à la maîtrise en agroforesterie à l'Université Laval. Durant la dernière année de cette maîtrise, je commence à chercher un emploi dans lequel je pourrais m'accomplir durant les dix ou quinze années qui me séparent de la retraite.

J'envoie des dizaines de CV, je passe des entrevues et je fais le concours de la fonction publique québécoise. Suite à ce concours, on me demande de passer un autre examen écrit et de me présenter à deux entrevues. Peu de temps après, je reçois une lettre m'indiquant que j'ai réussi toutes les étapes. Puis, quelques semaines plus tard, avant que les fonctionnaires ne se décident, le Conseil du Trésor met un terme temporaire à l'embauche. Bref, 16 mois après ma première entrevue pour ce poste (de 30 000$), on me dit que les besoins ont changé et qu'on doit tout recommencer.

 

Malgré tous mes efforts, je ne réussis pas à me trouver un emploi intéressant et ce n'est que par hasard qu'on me demande d'aller travailler à l'étranger, d'abord en Oman pour plusieurs mois puis dans l'Ouest canadien pour un contrat de trois ans. Un type d'emploi que j'aime, bien rémunéré et plein de défis intéressants. N'empêche, mes parents et mes beaux-parents ont près de 80 ans. Partir loin de sa famille, dans ces conditions, c'est difficile.

Ma question: pourquoi ne suis-je reconnu qu'à l'extérieur du Québec? Pourquoi ma valeur sur le marché du travail triple-t-elle quand j'accepte de m'exiler?

Et ce je ne suis pas seul dans mon cas. Je connais un tas de Québécois de tous les âges et dans beaucoup de domaines qui ont eu à partir pour accéder à un emploi décent. Pourquoi le Québec se prive-t-il de tous ces talents?

Quand j'entends dire qu'on aura besoin de plusieurs dizaines de milliers de personnes pour combler autant d'emplois dans quelques années, je me pose des questions. Et je ne peux m'empêcher de me dire qu'ils ne me feront pas travailler à temps plein quand je serai à la retraite, sous prétexte qu'il manque de main-d'oeuvre. Lorsque j'avais 20 ans, on me promettait dans un futur proche une société des loisirs... mon oeil!

Je crois savoir aussi que l'exode ne se fait pas que vers l'extérieur du Québec, mais aussi à l'intérieur même de la province: des régions vers les villes, du public vers le privé, etc. Le gouvernement impose à ses médecins et surtout à ses infirmières des conditions telles que le seul choix sensé qui s'offre à eux et à elles est le secteur privé.

Moi qui suis cette campagne à distance par les médias, ça me lève aussi le coeur que Jean Charest, qui n'a rien fait qui vaille depuis 2003, dise que tout est de la faute du PQ. Il ne faut quand même pas exagérer.»