C'est comme si Rafael Nadal et Roger Federer avaient été des amis d'enfance. Ou plus exactement si Nadal avait été l'ami de l'entraîneur de Federer. Mario Dumont se trouve à la tête de l'ADQ, l'opposition officielle, Michel Bissonnette souffle désormais à l'oreille de Jean Charest comme grand responsable de la campagne électorale libérale.

C'est un peu un match revanche pour ces deux-là.

Bissonnette et Dumont étaient littéralement inséparables quand, à l'époque de l'entente du Lac Meech, ils faisaient la pluie et le beau temps au Parti libéral du Québec comme dirigeants de l'aile jeunesse.

 

Ironiquement, à l'époque, tout le monde prédisait que Bissonnette ferait de la politique. Plus cérébral, timide, Mario Dumont était souvent la plume derrière les textes de Bissonnette.

Plusieurs observateurs ont souri hier quand ils ont vu le slogan de la campagne libérale: «L'économie d'abord: Oui». Un clin d'oeil aux nationalistes, habitués à appuyer le camp du OUI aux référendums. Comme le fleurdelisé, le Oui appartient à tous les Québécois, expliquait hier Jean Charest.

À cheval sur la clôture

Sous la conduite de Bissonnette et de Dumont les jeunes libéraux jouaient constamment sur la ligne étroite entre fédéralistes et souverainistes. Robert Bourassa était ravi, lui qui voulait attirer au PLQ les électeurs nationalistes. Claude Ryan, ultrafédéraliste, l'était beaucoup moins.

À la tête de la campagne libérale, Michel Bissonnette remplace Raymond Boucher qui avait fait les campagnes de 2003 et 2007. Plus jeune, plus proche des créateurs publicitaires, il sera passablement audacieux, prédisent les stratèges libéraux - déjà hier Jean Charest faisait sur la rive du fleuve Saint-Laurent le point de presse du déclenchement, traditionnellement fait au parlement.

La fissure

Après l'échec de Meech, le référendum sur l'entente de Charlottetown à l'automne 1992 causa une fissure irréparable entre les deux amis. Bissonnette soutiendra qu'ils avaient décidé, ensemble, de ne pas faire campagne contre l'entente de Charlottetown. Dumont décida plutôt de rompre les attaches avec le PLQ, de prendre la tête d'une phalange de jeunes libéraux opposés à Charlottetown, un groupe qui allait devenir le coeur de l'ADQ. Bissonnette rentra dans ses terres. Chacun était convaincu d'avoir été floué par l'autre.

Bissonnette travailla en publicité, pour BCP, puis, avec un succès retentissant, dans la production vidéo - il est un des instigateurs de Zone 3. «Comme publicitaire, il va falloir qu'il tienne bien fort le masque devant Jean Charest», soutenait Dumont relancé sur son ami, il y a quelques jours.