Louise Harel a gardé un profil bas au lendemain de sa défaite, hier, alors que les principaux ténors de son parti digéraient tant bien que mal la victoire de leur rival Gérald Tremblay. Certains ont montré du doigt Richard Bergeron pour avoir canalisé le vote de contestation, mais d'autres concèdent que Vision Montréal n'a simplement pas su mettre en valeur son programme électoral.

Pour les proches collaborateurs de Louise Harel, il est clair que la division du vote a favorisé la réélection du maire sortant. Ils soulignent que 62% des Montréalais ont voté contre M. Tremblay. C'est pourquoi certains blâment le chef de Projet Montréal, Richard Bergeron, pour avoir refusé une alliance avec Vision Montréal le printemps dernier.

 

«Si le maire est encore en poste pour un troisième mandat, ça m'apparaît évident que c'est la fragmentation du vote qui favorise ça, a affirmé Réal Ménard, élu maire de l'arrondissement de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve. Stratégiquement, je pense que M. Bergeron a manqué d'instinct.»

Certains membres de Vision Montréal comparent la victoire du maire à celle de Jean Charest aux élections de 2007, lorsque le chef péquiste André Boisclair et le leader adéquiste Mario Dumont s'étaient partagé le vote d'opposition. Pour d'autres, le scénario rappelle celui qui avait mené Pierre Bourque au pouvoir en 1998, alors qu'il s'était faufilé entre Jacques Duchesneau et Michel Prescott.

Quoi qu'il en soit, estime Lyn Thériault, élue conseillère dans le district Louis-Riel, les nombreux scandales qui ont marqué la course à la mairie auront finalement nui à Vision Montréal. Selon elle, les histoires de collusion et de corruption qui ont fait surface dans les dernières semaines ont incité plusieurs électeurs à bouder les urnes.

«Pourquoi refait-on confiance à une équipe malgré tout? demande-t-elle. J'ai l'impression que les gens ont retenu - et c'est ce qui est le plus amer ce matin - que les partis sont tous les mêmes.»

Certains affirment que la démission fracassante de Benoit Labonté à deux semaines du scrutin a marqué un tournant dans la course. Louise Harel a lancé sa campagne en brandissant un balai pour illustrer son intention de «faire le ménage» à l'hôtel de ville, disent-ils. Son message a perdu beaucoup de mordant lorsque des médias ont révélé les relations de son bras droit avec l'entrepreneur Tony Accurso.

«Ça n'a pas aidé, concède Anie Samson, réélue mairesse de l'arrondissement de Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension. Quand on dit qu'on est tous blancs et que, du jour au lendemain, il y a un petit mouton noir dans le groupe, au plan de la crédibilité, ça a un certain effet.»

Une autre source fait valoir que la candidature de Louise Harel, mère des fusions municipales et souverainiste de longue date, était difficile à vendre dans les arrondissements à forte population anglophone. C'est ce qui a permis à Union Montréal de faire le plein de votes à Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce, Lachine, Saint-Laurent et Saint-Léonard.

Harel devrait rester

Même si Louise Harel a été la seule chef de à ne pas faire de déclaration publique au lendemain des élections, son entourage croit qu'elle restera à la tête de Vision Montréal. À 63 ans, elle avait mis fin à sa retraite pour briguer la mairie. Serait-elle tentée de se retirer pour de bon?

«Compte tenu de tout ce qu'elle a vécu, a dit Lyn Thériault, je pense qu'elle va prendre sa place et que ça va brasser pour les quatre ans à venir.»