La visite de Stephen Harper à Val-d'Or, la première par un premier ministre du Canada depuis 1968, n'est pas passée inaperçue hier.

Le chef conservateur s'est d'abord heurté à son arrivée dans l'une des plus grandes circonscriptions du pays (Abitibi-Baie-James-Nunavik-Eeyou) à la plus importante manifestation de travailleurs et de groupes sociaux de toute la campagne à ce jour.

 

Alors que les nouvelles en provenance des États-Unis sur la situation financière des Bourses étaient plutôt alarmantes - un enjeu soudain devenu central à la campagne électorale (voir notre autre texte en page A6) -, quelque 300 travailleurs de la FTQ, de la CSN, de communautés autochtones et d'organisations féminines ont accueilli le chef conservateur avec des slogans hostiles.

Par contre, quelques minutes plus tard, le chef conservateur était accueilli dans un hôtel par un nombre comparable de sympathisants venus entendre ce qu'il avait à dire. Il a de plus été reçu par le maire de Val-d'Or, Fernand Trahan, qui a affirmé que M. Harper avait l'appui de tous les élus municipaux de la région.

«Nous sommes là, a expliqué le porte-parole des manifestants, le conseiller régional de la FTQ Gilles Chapadeau, parce que durant les 24 derniers mois du gouvernement conservateur, il y a eu un budget adopté. Il y avait une crise forestière qui dure toujours et ce gouvernement n'a rien fait pour aider les travailleurs de la forêt, alors que l'argent s'en est allé en Alberta. Les pertes d'emplois nous ont frappés de front ici au Québec et particulièrement dans notre région.»

Les manifestants ont reproché surtout au gouvernement Harper son maigre plan d'aide au secteur manufacturier en dérive, soit 1,2 milliard sur trois ans.

«Même le gouvernement du Québec a dit que ce n'était pas suffisant. Ils ont fait la sourde oreille. Nous sommes venus ici aujourd'hui pour dire que l'on se souvient», a ajouté M. Chapadeau.

Plusieurs manifestants protestaient également contre l'idéologie conservatrice et le projet de loi C-484 qui veut donner un statut juridique au foetus.

«On ne partage pas ces valeurs-là dans notre région», a encore affirmé Gilles Chapadeau aux journalistes.

Alors que les manifestants scandaient leur appui au Bloc québécois, le chef conservateur a surtout centré son discours sur l'absence de réalisations du Bloc québécois depuis qu'il siège à Ottawa.

«Le 14 octobre prochain, vous allez avoir l'occasion d'envoyer sur la glace des joueurs qui vont pouvoir marquer des buts pour vous», a lancé M. Harper à la foule amusée. «Il y a seulement le Bloc qui pense qu'on peut marquer des buts à partir des gradins...»

Le chef conservateur a ensuite brossé un vaste tableau des réalisations de son gouvernement, dont la reconnaissance de la nation québécoise, en soulignant qu'il avait tenu ses engagements sur la TPS, l'aide aux parents, le déséquilibre fiscal, la transparence et la réforme de la justice.

Il a d'ailleurs profité de l'occasion pour annoncer que s'il est élu, il augmentera le soutien aux Canadiens qui vivent dans des communautés dépendant d'une seule industrie à améliorer leurs compétences et à retourner sur le marché du travail. Il s'est ainsi engagé à augmenter de 50 millions de dollars par année jusqu'en 2012 l'Initiative ciblée pour les travailleurs âgés, un programme qui permet aux travailleurs mis à pied d'acquérir de l'expérience en période de difficultés économiques.

Plus tôt dans la journée, sans doute pour répondre aux critiques virulentes qu'il a reçues à propos de sa politique sur les arts et la culture, le chef conservateur a annoncé un nouveau crédit d'impôt pour les activités artistiques des enfants de moins de 16 ans -cours de piano, de peinture, de danse, etc.-, une mesure évaluée à 150 millions de dollars par année.

Le critique libéral en matière de culture, le député Denis Coderre, a réagi à cette annonce en qualifiant ce crédit d'«insignifiant» et le geste des conservateurs de «tentative de faire oublier leur bilan désastreux en matière d'arts et de culture».