Gilles Duceppe a servi une mise en garde à Laval ce matin aux électeurs en affirmant que le chef conservateur Stephen Harper avait l'intention secrète de criminaliser l'avortement s'il formait un gouvernement majoritaire.

Dans son quartier général électoral à Ottawa, M. Harper a répondu dare-dare au chef bloquiste en affirmant qu'il n'en était pas question et que toute sa carrière politique prouvait que cela n'a jamais été l'une de ses préoccupations.

Lorsque les journalistes ont en effet demandé au chef conservateur - qui avait déjà voté en faveur du projet de loi C-484 qui attribue un statut juridique au foetus - s'il allait faire en sorte que son parti ne rouvre pas le débat sur l'avortement au Canada, ce dernier a répondu oui.

«Ce gouvernement, a dit M. Harper, ne va pas rouvrir ou ne va pas permettre que quelqu'un rouvre le débat sur l'avortement. Notre position est claire. En ce qui concerne le projet de loi privé du député Ken Epp, la priorité principale de ce projet de loi est de protéger les femmes enceintes contre les actes de violence. Mais nous avons reconnu que cela a causé certaines inquiétudes. Pour cette raison le gouvernement va proposer son propre projet de loi qui répondra à ces inquiétudes.»

Le chef conservateur a précisé que le projet de loi qu'il entend déposer ne créerait pas de nouvelles infractions au Code criminel contre la violence faite aux femmes enceintes. «Il sera explicitement clair que cela ne concernera pas l'avortement», a-t-il dit.

M. Harper a d'ailleurs souligné que des gens dans son propre parti aimeraient bien que l'on reprenne au pays le débat sur l'avortement afin de criminaliser cette dernière. Il a cependant dit clairement ce matin que cela n'arrivera pas.

Le chef du Bloc québécois n'en demeure pas moins persuadé que les conservateurs, majoritaires, seraient une menace pour les droits des femmes.

La fermeture de plusieurs bureaux régionaux de Condition féminine Canada et ce projet de loi sur le statut juridique du fétus (C-484) sont, selon lui, des exemples qui laissent croire que Stephen Harper aurait un agenda caché néfaste pour les femmes.

«Tout porte à croire qu'un gouvernement Harper majoritaire rouvrirait la porte toute grande à la criminalisation de l'avortement», a dit M. Duceppe, à la sortie d'une rencontre avec des groupes de femmes, à Laval.

«C'est à un retour en arrière que nous convie Stephen Harper», a-t-il ajouté.

Le Bloc s'engage de son côté à proposer, dès le retour à la Chambre des communes après les élections, un projet de loi «proactif» sur l'équité salariale, comparable à ce qui est en vigueur au Québec.

Le chef bloquiste a souligné que 7 % des travailleuses québécoises relèvent du Code canadien du travail et n'ont donc pas droit aux mêmes conditions que les autres.

M. Duceppe s'est présenté devant la presse tout sourire, ce matin, gonflé à bloc par des sondages plus que favorables dans plusieurs régions du Québec. M. Harper pour sa part paraissait soucieux et parlait d'un ton monotone, sans doute encore ébranlé par les pertes d'appuis subies au Québec.

«Les Québécois ne se reconnaissent pas dans les politiques de M. Harper, a encore commenté Gilles Duceppe. Notre message passe passablement dans chacune des régions.»

«J'ai été clair tout le long de ma carrière politique, a conclu de son côté M. Harper ce matin. Je n'ai pas l'intention de rouvrir le débat sur l'avortement, même s'il y a des gens au Parti conservateur qui le souhaitent.»