Le gouvernement fédéral continue d'engranger des surplus malgré le ralentissement de l'économie mondiale et la crise hypothécaire qui fait des ravages aux États-Unis.

Le ministère des Finances a annoncé hier qu'Ottawa a enregistré un surplus de 2,9 milliards de dollars durant les quatre premiers mois du présent exercice financier, qui a commencé le 1er avril. Pour le seul mois de juillet, le surplus s'élevait à 1,7 milliard.

Ce surplus pour les quatre premiers mois dépasse déjà les prévisions du ministre des Finances James Flaherty pour l'ensemble du présent exercice. Dans son dernier budget, le grand argentier du pays avait prévu un maigre excédent budgétaire de 2,3 milliards de dollars.

Ces chiffres, qui sont publiés à quelques jours du débat des chefs, ont donné des munitions au premier ministre Stephen Harper hier. Depuis le début de la campagne, Stephen Harper se fait accuser par le chef libéral Stéphane Dion d'avoir dilapidé les surplus depuis son arrivée au pouvoir et d'avoir conduit le gouvernement fédéral tout près d'un déficit.

Cherchant à calmer la crainte des électeurs canadiens qui s'inquiètent des retombées au pays de la crise aux États-Unis, M. Harper a soutenu que le fait qu'Ottawa affiche toujours un surplus budgétaire démontre que son gouvernement a bien géré l'économie jusqu'ici.

Faisant campagne à Calgary, M. Harper a aussi affirmé que les partis de l'opposition, et particulièrement les libéraux, semblent souhaiter depuis le début de la campagne que le pays tombe en récession pour servir leurs intérêts politiques.

«Ils sont assis dans les estrades et poussent littéralement des cris d'encouragement pour une récession», a lancé Stephen Harper dans une de ses plus virulentes attaques contre les libéraux.

Le chef conservateur a dénoncé cette attitude «irresponsable». Il a affirmé que cela prouve que seul son parti peut gouverner le pays en des temps d'incertitude économique.

«Nous devons voir la réalité en face. Le Canada est sur la bonne voie parce que notre gouvernement a un plan économique qu'il suit à la lettre : réductions d'impôts, réduction de la dette, contrôle et efficacité des dépenses à l'échelle nationale et investissement dans la création des emplois de demain dans l'économie mondiale, a-t-il expliqué. Dans un climat d'incertitude économique croissante, c'est le plan dont le Canada a besoin.»

Mandat fort souhaité

M. Harper a profité de l'occasion pour lancer un appel plus senti pour obtenir un mandat fort des électeurs. «J'aimerais voir un Parlement où nous pourrions assurer une stabilité pour un certain temps, et où les partis de l'opposition peuvent se concentrer à faire une contribution positive à l'ordre du jour du gouvernement plutôt que de seulement essayer de le battre à chaque fois ou attaquer l'économie du pays», a-t-il dit.

De passage à Belmont, en Ontario, le chef libéral Stéphane Dion contenait mal sa colère après avoir pris connaissances des propos « ignobles » de Stephen Harper.

«Honte à lui !» a-t-il lancé sur un ton rageur devant les journalistes qui ne l'avaient jamais vu dans un pareil état.

M. Dion a soutenu que le chef conservateur a dépassé les bornes.

«C'est aller plus bas que jamais que d'accuser son adversaire politique de souhaiter du mal aux gens, a-t-il dit. Nous voulons tous que ça aille bien au Canada. Nous sommes tous en politique pour cela. Nous faisons, dans tous les partis, des sacrifices énormes. On ne devrait jamais mettre en cause les motivations des autres de cette façon. C'est ignoble de sa part.»

Le chef libéral a alors rappelé que lorsqu'il avait interrogé le premier ministre Harper aux Communes sur sa mauvaise gestion de la mission canadienne en Afghanistan, ce dernier l'avait accusé d'être pro-taliban. Plus récemment, au début de la campagne, le chef conservateur a aussi accusé M. Dion de vouloir diviser le pays en proposant son Tournant vert.

«Moi, vouloir diviser le pays? Je n'ai jamais pensé qu'il pourrait aller plus bas que cela, a encore commenté Stéphane Dion. Mais il l'a fait aujourd'hui. Il m'a accusé de souhaiter qu'il y ait au Canada une récession parce que j'ai osé critiquer sa mauvaise gestion de l'économie. Honte à lui!»



Inflation


Le chef libéral a alors brossé un tableau sombre du bilan de M. Harper, l'accroissement des pertes d'emplois, la montée de l'inflation, la baisse de la croissance économique, la baisse des exportations.

«C'est cela que je critique, a-t-il dit. C'est pourquoi je veux le remplacer pour donner au Canada un bon gouvernement, un gouvernement qui donnera du travail aux gens et une bonne qualité de vie.»

Quant aux surplus annoncés hier, M. Dion les a qualifiés de « modestes » en soulignant qu'ils étaient le résultat de la croissance de l'inflation.

«Il reste que l'économie canadienne croît plus lentement que celle des autres pays du G8 et que le laisser-faire de Stephen Harper a fait en sorte que notre productivité est en chute. Les raisons d'être inquiet par rapport à ses politiques demeurent très fortes.»