Alors que le milieu culturel s'invite au coeur de la campagne électorale fédérale, les chefs des partis ont tous condamné hier les compressions du gouvernement de Stephen Harper en culture, mais aussi les propos tenus par le chef conservateur contre les artistes.

Pour le chef du Bloc québécois, Gilles Duceppe, M. Harper fait preuve de mépris lorsqu'il affirme que les gens ordinaires n'ont aucune sympathie pour les artistes qui vont dans les galas réclamer plus de subventions, faisant allusion à la récente soirée des Gémeaux.

 

«Je n'ai pas cette vision élitiste de la société. Je pense que les gens considèrent que la culture c'est drôlement important, a dit M. Duceppe, à Québec. Ça démontre encore l'étroitesse d'esprit de M. Harper. C'est un mépris de sa part.»

Selon lui, la classe moyenne est davantage «irritée» par les «cadeaux fiscaux de 2,7 milliards» octroyés aux pétrolières par le gouvernement Harper «alors que les gens ont de la difficulté à arriver».

Le secteur culturel représente beaucoup d'emplois et des retombées économiques dans toutes les régions, a rappelé M. Duceppe dans une allocution devant la Chambre de commerce de Québec. «En 2005, la culture comme secteur économique a connu un taux de croissance à la chinoise, de 9,3% dans la région de Québec», a lancé le chef du Bloc.

À titre d'exemple, il a rappelé le succès du Cirque du Soleil, fleuron culturel québécois. «Dans le temps, quand le Cirque n'était encore qu'une toute petite entreprise dans Charlevoix, René Lévesque leur a donné quelques milliers de dollars, a souligné M. Duceppe dans son discours. Le Cirque du Soleil est devenu une multinationale qui fait notre fierté et qui a créé des milliers d'emplois et généré des retombées économiques spectaculaires pour le Québec.»

Un bon investissement

«Nous devons stopper cet homme! Il veut monter tout le monde contre tout le monde; les Canadiens contre leurs artistes», a pour sa part lancé Stéphane Dion dans un studio de cinéma de Vancouver Nord, réagissant aux déclarations faites plus tôt par M. Harper sur la culture et les artistes.

«Nous parlons d'une industrie qui, dans cette seule province (la Colombie-Britannique), représente 36 000 emplois dans les seuls secteurs de la télévision et du cinéma, a-t-il ajouté. Nous avons une grande industrie culturelle. Il faut protéger sa liberté. Cet homme veut censurer nos films. Il faut le stopper!»

M. Dion a souligné que les gens qui faisaient la queue à la porte de ces studios pour auditionner étaient aussi des Canadiens ordinaires, que le salaire moyen d'un artiste au pays était de 23 000$ et que les artistes qui participaient aux galas décriés par M. Harper devaient louer leurs costumes ou leurs robes pour y assister.

Le chef libéral a profité de son passage au Studio cinématographique de North Shore pour rappeler que son programme électoral prévoit une augmentation du crédit d'impôt pour le cinéma et la télévision de 25% à 30%, une hausse qui représente 160 millions de dollars sur quatre ans pour le budget de l'État.

«Investir dans les arts et la culture, a-t-il dit, c'est investir dans des industries qui procurent les plus importants retours sur vos investissements. Investir dans les arts et la culture, c'est investir dans les Canadiens ordinaires. Je ne connais aucune grande économie au monde qui n'ait pas un secteur culturel fort.»

»Tueur de culture»

Lui aussi de passage à Québec, le chef du NPD, Jack Layton, a promis en matinée d'annuler les coupes du gouvernement Harper en culture.

«M. Harper est en train de réduire le financement nécessaire de la culture et des arts, ce sont des actions très néfastes et dramatiques, on a besoin de mots forts pour le décrire», a dit M. Layton, au moment même où une nouvelle campagne publicitaire néo-démocrate qualifie le Parti conservateur de «tueur de culture».

Les conservateurs menacent, selon lui, de faire augmenter le nombre de chômeurs avec des compressions dans un secteur d'activités important pour l'économie, notamment au Québec.

«Stephen Harper ne comprend rien aux artistes», a aussi déclaré M. Layton, en marge de la soirée Les coupures, ça tue la culture. «La culture, c'est l'âme de la nation québécoise», a souligné pour sa part M. Duceppe.