Le premier budget des conservateurs en matière de culture était surévalué. De plus, une partie des sommes allouées aux arts a été réaffectée au sport et au multiculturalisme. Voilà ce qui ressort d'un rapport de la Conférence canadienne des arts (CCA), que La Presse a obtenu.

L'étude sera rendue publique aujourd'hui. Elle remet en perspective les affirmations des conservateurs, qui soutiennent avoir augmenté de 8% le financement de la culture.

 

«On peut difficilement comparer le budget du gouvernement Martin (2005-2006) au premier des conservateurs (2006-2007), prévient Alain Pineau, directeur général du CCA. Pour comprendre pourquoi, il faut faire une distinction entre le budget principal et le budget supplémentaire. Au déclenchement des élections en novembre 2005, les sommes supplémentaires n'avaient pas encore été comptabilisées. Elles ont donc dû être inscrites dans le budget suivant. Cela le gonfle artificiellement. Les dépenses des libéraux sont ainsi sous-évaluées, et celles des conservateurs sont surévaluées.»

Depuis ce premier budget conservateur, «le financement total des subventions et des programmes de contributions clés du ministère du Patrimoine canadien est demeuré relativement (stable)», avance le rapport. Ce qui a changé, c'est la distribution des sommes.

Redistribution

Il n'y a pas eu d'argent frais, mais plutôt une redistribution de l'argent. Les gagnants: le sport et le multiculturalisme.

Rappelons que Patrimoine Canada comporte deux volets: les «expériences culturelles» (surtout arts et institutions culturelles) et la «compréhension interculturelle» (surtout multiculturalisme et sport). Cette année, le budget du deuxième volet a augmenté de 46,1 millions. Celui du premier a diminué de 17,8 millions.

De 2007-2008 à 2008-2009, la proportion du financement de Patrimoine Canada au premier volet passera ainsi de 57 à 54,6%. Cette baisse s'explique notamment par les séries de coupes décriées par la communauté artistique (45 millions).

L'argent de ces compressions a notamment été réaffecté au Conseil des arts, qui reçoit 30 millions de plus par année (somme récurrente). Il est aussi réaffecté à des éléments du second volet de Patrimoine Canada, dont le relais de la flamme olympique (49 millions en deux ans), le soutien aux athlètes pour les Jeux d'été (24 millions) et le Plan d'action sur les langues officielles (24,7 millions).

Tandis que la promotion des arts à l'étranger a été amputée, le financement des arts à l'échelle locale a augmenté. Le financement de Canada en fête! a passé de 13 à 32 millions (surtout à cause du 400e de Québec et du Congrès eucharistique international). Le budget du programme Développement des communautés par le biais des arts et du patrimoine (fêtes locales) a quant à lui passé de 3,092 à 7 millions.

Nouvelle coupe?

Le rapport ne comptabilise pas une coupe appréhendée: celle du Fonds des nouveaux médias (14,5 millions, dont 5 millions au Québec). «Les fonctionnaires nous ont dit: «On ne peut rien confirmer ou infirmer», dit Alain Pineau. Mais la rumeur est très forte. J'ai entendu des gens liés au programme dire qu'ils devront se chercher un nouvel emploi.»

Le 30 août, le Globe and Mail a annoncé la disparition du Fonds des nouveaux médias. Des fonctionnaires ont depuis confié à la ministre québécoise de la Culture, Christine St-Pierre, que l'abolition serait imminente. Plus tôt cette semaine, la ministre Josée Verner a nié cette éventualité.