Sans pancarte ni grande stratégie médiatique, les partis politiques marginaux font une campagne de terrain, joignant les électeurs presque un à un. Afin de comprendre cette autre réalité, nous avons suivi Serge Lachapelle, candidat marxiste-léniniste à Montréal, dans l'une de ses sorties électorales.

«Renouveau démocratique avec le Parti marxiste-léniniste... Pour un gouvernement antiguerre le 14 octobre prochain... Votez marxiste-léniniste.»

Aux portes de l'Université du Québec à Montréal, Serge Lachapelle répète inlassablement les mêmes phrases et tend des dépliants aux étudiants pressés d'aller prendre le métro. Ils sont des dizaines à passer sans même le regarder. Mais à l'occasion, une main se tend.

 

«Pourquoi tu as pris ça? demande une jeune femme à sa copine.

Je sais pas... juste pour le lire! Je veux seulement voir ce qu'ils disent», lui répond-elle, les yeux rivés sur la feuille rouge et orange.

Un sac de la CSN en bandoulière sur l'épaule, cherchant à accrocher un regard sympathisant dans la foule, le journaliste pigiste de 55 ans n'entend rien de la conversation. Il ne serait toutefois pas surpris. Il sait que dans le lot, quelques jeunes s'intéresseront de plus près au programme de son parti.

Les jeunes d'aujourd'hui n'ont pas connu la guerre froide, explique-t-il. « Ils n'ont pas la vision bipolaire du monde que nous avons connue autrefois. Pour eux, il n'y a pas le Mal d'un côté et le Bien de l'autre. Ils sont très ouverts.»

C'est donc à pied que M. Lachapelle parcourt la circonscription de Laurier-Sainte-Marie, qui englobe une grande partie du Plateau-Mont-Royal. Il distribue des dépliants et cogne aux portes de deux ou trois rues chaque soir. Pour faire connaître ses idées et celles de son parti, il participe à la rédaction du journal quotidien du PMLC, publié sur l'internet.

Il s'intéresse particulièrement aux problèmes d'accessibilité du logement dans son quartier et, de manière plus large, il souhaite un jour voir le pouvoir entre les mains du peuple, et non plus entre les mains de «2% d'élus qui peuvent faire ce qu'ils veulent une fois au pouvoir». Ce sont notamment ces questions qu'il aborde avec les électeurs.

Dans la circonscription de Gilles Duceppe, où huit autres candidats briguent le suffrage, la faveur populaire ne lui est toutefois pas acquise. Aux dernières élections fédérales, la candidate marxiste-léniniste n'a obtenu que 137 votes (0,3% des voix), soit 201 appuis de moins que le Parti marijuana.

Dans Westmount-Ville-Marie, Serge Lachapelle avait alors récolté 94 votes, soit environ 0,2% des voix.

N'empêche, la campagne électorale n'a rien d'une corvée aux yeux du candidat. «L'accueil des gens est toujours très chaleureux. Ils sont généralement intéressés à parler de politique, fait-il remarquer. Ils sont désenchantés de la politique actuelle, alors ils cherchent une option.»

Les idées d'abord

Sans grand financement, le Parti marxiste-léniniste ne dispose que de dépliants photocopiés et d'un site internet mis à jour quotidiennement. Serge Lachapelle n'a pas les moyens d'avoir des pancartes.

Il peut toutefois compter sur le soutien des 19 autres candidats québécois du PLMC. Quand nous l'avons rencontré, il était d'ailleurs accompagné de Pierre Chénier, secrétaire du parti, et de Stéphane Chénier, candidat dans Rosemont-La Petite-Patrie.

Est-ce frustrant que malgré tous ces efforts, les électeurs ne l'appuient que dans une infime proportion? «Pas du tout, assure-t-il. Je sais que le mouvement révolutionnaire est dans une période de repli, mais je suis sûr que lorsqu'il va reprendre, les gens vont se remettre à lire Marx et à s'intéresser à Lénine. Ils vont découvrir qu'ils ont apporté des éléments extraordinaires au monde.»

En attendant le prochain grand changement social, le candidat soutient que les idées avancées par son parti contribuent à améliorer la société canadienne. Ses idées de gauche notamment, trouvent écho dans la population, dit-il.

«On fait partie du processus de changement. Seulement, le processus électoral actuel ne permet pas le financement équitable de tous les partis. Quoi qu'en pensent ceux qui organisent les débats télévisés, nous sommes modernes et très sérieux!»