Les libéraux ont à peine présenté le cadre financier de leur programme électoral qu'ils ont essuyé le tir regroupé de leurs adversaires, samedi.

Tant les néo-démocrates que les conservateurs ont rapidement jeté leur venin sur les chiffres présentés par les troupes libérales.

En l'absence de Justin Trudeau, les libéraux avaient délégué quatre candidats reconnus pour leur expertise sur le plan économique pour expliquer le cadre financier.

Les libéraux assurent qu'ils parviendront à équilibrer le budget fédéral lors de la dernière année du mandat d'un gouvernement libéral majoritaire, et ce, même s'ils prévoient des dépenses supplémentaires et des réductions d'impôts totalisant près de 146,5 milliards de dollars. Ils ont reconnu que les trois premiers budgets qu'ils présenteront accuseront un déficit.

Ils ont affirmé que le budget de l'an 4 d'un gouvernement libéral afficherait un surplus d'un milliard de dollars.

Au cours des deux premières années d'un éventuel mandat, les libéraux comptent enregistrer des déficits annuels légèrement inférieurs à 10 milliards. Ils veulent dépenser 33 milliards de plus par année dans les infrastructures et un nouveau programme d'allocations familiales mensuelles. Ils espèrent que les dépenses en infrastructures stimuleront une croissance économique qui permettra au gouvernement d'augmenter ses revenus.

«Nous sommes honnêtes. Nous disons clairement que, oui, nous aurons des déficits pour trois ans afin de générer l'investissement et la croissance d'emplois dont le Canada a besoin», a déclaré John McCallum, un ancien ministre du Revenu et candidat dans la circonscription ontarienne de Markham-Thornhill.

Les libéraux se disent très prudents dans leur cadre. «Nous supposons que les programmes considérables d'investissement en infrastructure ne causeront pas de croissance économique au cours des prochaines années. Ils vont stimuler l'économie et créer des emplois mais, par souci de prudence, nous n'incluons pas leurs effets dans le cadre financier qui est présenté aujourd'hui», a souligné un candidat libéral dans la région de Québec, Jean-Yves Duclos.

S'ils disent n'avoir pas calculé les effets multiplicateurs de leurs investissements, les libéraux n'ont pas calculé non plus les revenus fiscaux qu'engendrait la légalisation de la marijuana.

Un plan décrié

Les critiques formulées par le candidat conservateur albertain Jason Kenney décrivent bien le gouffre idéologique séparant les deux partis. Selon lui, le plan libéral ne pourrait survenir «à un pire moment».

«L'économie est encore fragile. Il faut donc maintenir une discipline fiscale et les baisses d'impôts pour créer de l'emploi. Elle n'a pas besoin de dépenses irréfléchies et d'énormes déficits qui ne feront qu'augmenter notre dette. Elle n'a pas besoin de taxes qui tuent l'emploi», a-t-il insisté, répétant ainsi le crédo conservateur.

Il a comparé le programme libéral aux politiques fiscales canadiennes des années 1970. «Il (Justin Trudeau) veut revoir les grands déficits et augmenter la dette publique, a-t-il déclaré, avant d'ajouter que le plan des libéraux représentera un «fardeau fiscal pour les Canadiens».

Les néo-démocrates ont également dénigré le cadre financier de leur adversaire. Selon eux, le programme libéral repose sur «l'austérité, des promesses infondées et des mauvais calculs».

«Justin Trudeau a déjà dépassé sa limite de crédit de 10 milliards pour la première année de son plan et il a surestimé sa capacité de rembourser», a accusé la candidate du parti dans la circonscription de Longueuil-Charles-Lemoyne, Sadia Groguhé.

Le Nouveau Parti démocratique reproche aux libéraux de ne pas avoir inclus toutes leurs promesses électorales dans leur cadre financier. «Ce qui devrait nous inquiéter encore plus, c'est qu'il a atteint sa limite de crédit sans nous parler de son plan sur la santé», a ajouté Mme Groguhé.

L'ancien ministre des Finances de la Saskatchewan Andrew Thomson - qui se présente dans une circonscription de la région de Toronto - a affirmé que les réductions des dépenses jugées non essentielles auront comme conséquences des «coupes profondes dans les services sur lesquels se fient les Canadiens».

M. Thomson fronce aussi les sourcils devant la promesse de publier une mise à jour économique et financière. «La dernière fois qu'ils ont fait cet exercice, cela a résulté en des coupes profondes et d'importantes mises à pied dans la fonction publique», a-t-il accusé.

Le chef du Bloc québécois Gilles Duceppe était le seul à être activement en campagne, samedi. Il a participé à une manifestation organisée par la municipalité de Mascouche contre le projet d'oléoduc Énergie Est.

En point de presse, il a notamment commenté le cadre financier présenté par les libéraux.

«Je pense qu'il a été fait rigoureusement (...). Ça contraste avec celui du NPD qui tenait sur une page, il n'y avait rien de clair là-dedans sauf qu'ils pigent dans la caisse d'assurance-emploi. Les libéraux, malheureusement, c'est clair également qu'ils vont prendre de l'argent de la caisse d'assurance-emploi.»