Les syndicats doivent se rapprocher davantage du public canadien pour tenir tête aux gouvernements qui tentent de faire reculer les droits des travailleurs, selon le chef de l'organisation syndicale la plus importante du pays.

Le président du Congrès du travail du Canada (CTC) Hassan Yussuff affirme que les syndicats auraient avantage à mieux expliquer leurs valeurs et leur rôle dans la société aux Canadiens.

Lors d'une récente entrevue avec La Presse Canadienne, M. Yussuff a rappelé que les syndicats, à travers le temps, avaient contribué à améliorer la santé et la sécurité au travail, les régimes de retraite et les normes du travail - mais ces avancées sont pour la plupart méconnues, selon lui.

Plusieurs Canadiens croient que ces progrès résultent de la générosité des gouvernements et ils ne perçoivent pas les syndicats comme les vrais agents de changement, a-t-il déploré.

Or, ces avancées dans le milieu du travail ont été initiées par le militantisme du mouvement syndical, a plaidé M. Yussuff, qui a souligné l'importance de «mieux raconter l'histoire».

Ce sont ces idées qui seront mises de l'avant dans la campagne «Être juste», lancée par le CTC. Le congrès espère également attirer l'attention des gouvernements, dont plusieurs poursuivent des programmes d'austérité qui ciblent généralement les syndicats.

M. Yussuff a par ailleurs relevé que plusieurs jugements de la Cour suprême du Canada avaient donné raison au mouvement syndical - ce qui justifie leur pertinence auprès du public, selon lui. Le plus haut tribunal du pays a «rééquilibré la balance» qui a réaffirmé le droit à la négociation, le droit de grève et la liberté d'association, a-t-il affirmé.

Selon Larry Haiven, professeur en administration à l'Université St. Mary, l'un des problèmes du mouvement syndical est que les gouvernements ne voient aucun inconvénient auprès du public à attaquer ouvertement les syndicats, surtout ceux du secteur public.

L'expert croit que plusieurs travailleurs ont identifié les ennemis comme étant «tous ceux qui ont une pension» et les gouvernements profitent de cette frustration pour sabrer dans les dépenses.

M. Haiven reconnaît que les tribunaux ont souvent favorisé les syndicats, mais ces arrêts prennent souvent bien du temps à entrer en vigueur et les gouvernements ont généralement beaucoup de latitude, a-t-il expliqué.

Ainsi, les gouvernements peuvent profiter d'un délai pour changer la loi à la lumière de ces jugements et il faut parfois attendre près d'une décennie pour que certaines modifications soient apportées, a ajouté M. Haiven.

Par exemple, la Nouvelle-Écosse a adopté une loi sur les services essentiels qui a mis fin à une grève des infirmières en avril 2014 - et ce, même si une loi similaire de la Saskatchewan était devant la Cour suprême. Le tribunal a finalement statué que la loi saskatchewanaise était inconstitutionnelle.