Menacé partout dans la province par la montée du NPD, le Bloc québécois n'a néanmoins pas oublié son vieux rival conservateur dans la région de Québec.                

En cette journée de campagne pluvieuse, la caravane de Gilles Duceppe croisera celle du premier ministre conservateur Stephen Harper en soirée dans la Vieille Capitale. Le chef libéral Michael Ignatieff était à Québec ce matin. La preuve que tout est encore possible à Québec, selon Gilles Duceppe. « S'il y a trois chefs qui vont là aujourd'hui, c'est qu'il y a une bataille Québec, dit-il. Il y a certainement quelque chose qui se passe là-bas...»

La ville à l'humeur politique changeante a toujours représenté son lot de défis pour le Bloc québécois. « On a eu tous les députés en 1993, c'était divisé en 1997, les libéraux ont été majoritaires en 2000, on a tout gagné en 2004, puis majoritaire conservateur en 2006 et c'est redevenu égal en 2008. S'il y a une place où personne ne peut rien tenir pour acquis, c'est bien Québec», dit Gilles Duceppe.

Cette fois-ci, le parti de Gilles Duceppe espérait tirer profit du refus des conservateurs de financer le futur amphithéâtre. L'effet Colisée n'est toutefois pas au rendez-vous dans les sondages. « Ça joue toujours, mais ce n'est pas la seule question », dit Gilles Duceppe, qui compte trois députés bloquistes à Québec. Le Parti conservateur en a aussi trois, et l'ex-animateur de radio André Arthur siège comme indépendant dans Portneuf-Jacques-Cartier.

Le Bloc québécois veut notamment que le gouvernement fédéral fasse la réfection et devienne propriétaire du pont de Québec, actuellement détenu par le transporteur ferroviaire CN. « M. Harper nous disait : les libéraux ne sont même pas capables de le peinturer, dit Gilles Duceppe. Il se moquait du ministre Jean Lapierre. Force est de constater qu'ils ont perdu les pinceaux parce qu'il ne se passe rien.»

Au nombre des autres enjeux électoraux du Bloc à Québec : le chantier maritime Davie, présentement sous la protection de la loi sur les créanciers, qui a jusqu'au 18 mai pour s'entendre un acheteur potentiel et ainsi avoir la chance d'obtenir des contrats fédéraux. Il s'agit d'une pomme de discorde entre bloquistes et conservateurs, le député conservateur Steven Blaney ayant même traité Gilles Duceppe de « menteur » plus tôt durant la campagne électorale.

Avant de prendre le chemin de la Vieille Capitale, le chef du Bloc québécois a fait la lutte ce matin aux conservateurs dans le comté de Montmagny-L'Islet-Kamouraska-Rivière-du-Loup, qui lui a été ravi par 1400 voix dans une élection partielle en 2009.

Pour convaincre les électeurs du Bas-du-Fleuve de rentrer au bercail, Gilles Duceppe mise sur sa réforme de l'assurance-emploi. « On comprend mal que les trois autres partis veulent piger 17 milliards dans la caisse d'assurance-emploi, ce qui est toute une différence avec le Bloc, dit-il. Ce pillage avait été dénoncé par les conservateurs auparavant. Ce qui est surprenant, c'est que le NPD a le même cadre financier. »

À quatre jours du vote, Gilles Duceppe a rappelé aux électeurs du comté une déclaration de leur député conservateur Bernard Généreux au sujet de la fermeture de l'usine Whirpool à Montmagny en 2004, qui avait servi « d'électrochoc » pour diversifier l'économie de la région. « Sa position sur (l'usine de Bombardier à) La Pocatière, c'est que c'est plus ou moins grave ou grave s'il y a un électrochoc comme ça a été le cas à Montmagny, que ça fera du bien aux gens. Moi, je pense que ça ne fait jamais du bien de perdre son emploi », dit Gilles Duceppe.

Le Bloc québécois espère mettre derrière lui l'incident Gérald Larose, qui a fait dérailler sa campagne hier. Le président du Conseil de la souveraineté s'est excusé d'avoir traité le chef du NPD, Jack Layton, «d'imposteur » et de « crapule » au cours d'une conférence de presse avec des candidats bloquistes de Montréal. Gérald Larose a aussi comparé les politiciens des autres partis fédéraux à des « crosseurs professionnels ».

Gilles Duceppe considère l'incident clôt. « Ce n'est pas des propos qui sont acceptables, dit-il. Dans la vie, il y a des bonnes choses et des moins bonnes choses, et ça fait partie des moins bonnes choses. Je m'attendais plutôt à une analyse solide dans des termes corrects (de la part de Gérald Larose).»