Les adversaires politiques de Stephen Harper ont unanimement dénoncé, mardi, l'attitude contrôlante et «antidémocratique» de l'organisation conservatrice qui restreint au maximum l'accès aux événements partisans et a même empêché des citoyens de participer à des rassemblements parce qu'on les soupçonnait de ne pas être fidèles au parti.

Au cours des derniers jours, les médias ont rapporté plusieurs incidents de ce genre. Un Néo-Écossais nommé Jim Lowther, qui milite pour les droits des vétérans, s'est ainsi vu interdire l'accès à une annonce de Stephen Harper à Halifax la semaine dernière.

Des étudiants ont ensuite été exclus d'un événement à Guelph, en Ontario, et un homme a connu un sort semblable à London, également en Ontario. Les organisateurs conservateurs lui auraient demandé de quitter les lieux d'un rassemblement mettant en vedette le premier ministre après avoir vu un autocollant du NPD sur sa voiture.

En milieu de soirée mardi, Joanna MacDonald a confié avoir, elle aussi, été invitée à quitter les lieux d'une activité du Parti conservateur, tenue lundi à l'Université de Guelph, où elle étudie.

Après avoir demandé pourquoi elle devait partir, alors qu'elle n'avait aucun casier judiciaire et aucune affiliation politique, l'étudiante en Sciences environnementales se serait fait dire par un responsable non identifié que c'était probablement parce qu'elle aurait participé à une activité de la Coalition jeunesse Sierra sur les changements climatiques, dans le cadre de la Conférence de Cancun en décembre 2010.

L'histoire qui a fait couler le plus d'encre est toutefois celle d'Awish Aslam, une étudiante de 19 ans, qui a elle aussi été expulsée du rassemblement de London parce qu'elle avait mis dans sa page Facebook une photo d'elle en compagnie de M. Ignatieff.

Jusqu'à maintenant, Stephen Harper a refusé de s'excuser et même de prendre le blâme pour ces incidents, sous prétexte qu'il n'organisait pas lui-même les événements partisans. «Du personnel gère notre campagne», s'est-il contenté de dire lors d'un point de presse à Victoriaville, mardi.

Le chef conservateur maintient que sa tournée électorale se déroule comme prévu. Il se vante même de remplir ses salles soir après soir et d'attirer plus de monde à lui tout seul que ses trois principaux adversaires réunis. Son directeur des communications, Dimitri Soudas, a d'ailleurs affirmé aux médias que les contrôles rigoureux étaient nécessaires à cause de la popularité des événements auxquels participe le premier ministre sortant.

Pour le chef libéral, cette attitude est «inadmissible». «Je regrette beaucoup que M. Harper exerce plus de contrôle sur son auditoire pendant une élection qu'il ne le fait dans son bureau de premier ministre», a déclaré M. Ignatieff en faisant notamment référence à Bruce Carson, un ancien proche conseiller des conservateurs qui a été condamné pour fraude à cinq reprises.

M. Ignatieff s'est moqué de son principal rival en écrivant sur Twitter qu'il avait fait une escale dans un restaurant Tim Horton pour prendre un café et discuter avec des citoyens dont il n'avait pas consulté le profil Facebook au préalable.

De passage à Winnipeg, le leader néo-démocrate Jack Layton a tenu un discours semblable. À son avis, le comportement des conservateurs et de leur chef a de quoi inquiéter les Canadiens. «C'est une approche qui divise les gens entre les amis du premier ministre et les autres. Au lieu de rassembler les gens et de les encourager à participer à la politique, on ferme la porte. Ce n'est pas bon», a-t-il insisté.

Gilles Duceppe, qui est le plus expérimenté des chefs, dit n'avoir jamais eu besoin d'expulser quelqu'un d'un événement partisan. «Je ne mets pas de clôture non plus», a-t-il ajouté pour le bénéfice des journalistes qui se sont retrouvés derrière une barrière à des dizaines de mètres de Stephen Harper lors d'une annonce, la semaine dernière.