(Québec) Québec « n’a pas l’intention » d’interdire les salles de recueillement où des étudiants font des prières dans les cégeps et les universités, indique le cabinet de la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry. En ce qui concerne la directive qui doit les interdire dans les écoles secondaires publiques, le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, affirme qu’elle est toujours en cours de rédaction.

Pour la dernière séance des travaux parlementaires avant le long week-end de Pâques, jeudi, la question des locaux consacrés aux prières et au recueillement dans les écoles a une fois de plus généré des débats au Parlement.

Avant la période de questions, le ministre responsable de la Laïcité, Jean-François Roberge, a affirmé que la position du gouvernement est que « nos écoles publiques sont laïques » et qu’on ne peut pas, dans ce contexte, « avoir dans nos écoles des locaux réservés à la prière où on va séparer les élèves en fonction de leur religion ». Mercredi, M. Drainville faisait un pas de plus, promettant que sa directive interdirait tout simplement l’aménagement de locaux réservés à la prière.

Plus tôt cette semaine, Cogeco Nouvelles a rapporté que des écoles secondaires de Laval, entre autres, avaient aménagé des salles de recueillement dans des classes, alors que des groupes d’élèves priaient dans des lieux inappropriés, comme dans les cages d’escalier ou dans le stationnement. Le ministre de l’Éducation les a depuis invités à prier en silence et a promis d’interdire ce genre d’aménagement.

Le chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon, a affirmé qu’il est « difficile de croire » qu’il n’y a pas ces jours-ci une « action concertée dans le but de changer ce qui était une compréhension commune au Québec, à savoir qu’une école n’est pas un lieu de culte ».

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Paul St-Pierre Plamondon

Sans donner aucun détail, le chef péquiste a affirmé que la multiplication de demandes dans certaines écoles secondaires afin d’ouvrir des locaux où prier sur l’heure du midi « coïncide également avec des appels téléphoniques qu’on a reçus, qui n’étaient pas tout à fait agréables, sur ces questions-là ».

Que disaient ces appels ? M. St-Pierre Plamondon a refusé de répondre. « Je n’irai pas plus loin pour l’instant. Je vais demander le consentement de tout le monde et m’assurer avant de divulguer, mais le fait est que ça aussi, ça existe. Dans un tel contexte, c’est difficile de croire que ce ne soit pas une action concertée », a-t-il dit.

« Je ne pense pas qu’on peut qualifier [ces appels] de menaces. Je pense qu’on parle d’une forme de moyens de pression. Il faut en effet voir l’ensemble des faits qui sont vraiment simultanés pour en effet constater qu’il semble y avoir une volonté de réintroduire le religieux dans nos écoles », a ajouté le chef du PQ.

QS et le PLQ défendent leur position 

En points de presse, jeudi, le chef par intérim du Parti libéral du Québec (PLQ), Marc Tanguay, tout comme le chef parlementaire de Québec solidaire (QS), Gabriel Nadeau-Dubois, ont expliqué pourquoi leurs formations poltiques avaient appuyé la motion déposée mercredi par le Parti québécois, qui stipulait que « la mise en place de lieux de prière, peu importe la confession, dans les locaux d’une école publique va à l’encontre du principe de laïcité ».

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Marc Tanguay

M. Tanguay a affirmé qu’il est « en défaveur qu’il y ait un local de chapelle, que ça soit une chapelle, une synagogue ou une mosquée, dans une institution publique ». Or, les cas rapportés depuis lundi mentionnent des locaux transformés en lieux de prière multiconfessionnels.

« C’est important que le ministre [Bernard Drainville] et son ministère mettent par écrit des directives claires et complètes pour les décideurs partout sur le territoire du Québec. […] Au-delà de ce que le ministre peut vous dire en scrum les deux mains dans les poches, il faut qu’il le mette par écrit », a répliqué M. Tanguay, qui a affirmé qu’il voyait d’un bon œil l’aménagement de salles de recueillement accessible aux athées tout comme aux élèves de toutes les confessions religieuses.

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Gabriel Nadeau-Dubois

Gabriel Nadeau-Dubois a pour sa part affirmé jeudi qu’il s’attend à ce que la directive, qui doit être envoyée par M. Drainville, « respecte le gros bon sens ».

« Des lieux de culte à l’intérieur des écoles, il n’y a personne qui est d’accord avec ça au Québec. Mais des salles de recueillement, des salles de méditation où les gens peuvent s’adonner à différentes activités, qu’ils aient une religion ou non, ça existe déjà dans plusieurs institutions publiques […] et ça ne fait pas de problèmes nulle part », a-t-il dit.

Par ailleurs, le chef parlementaire de QS a rappelé que les députés, à chaque début de séance au Salon bleu, ont un moment de recueillement. Cette tradition remonte au 15 décembre 1976, alors que le président de la Chambre à l’époque, le député Clément Richard, a mis fin à la prière « par respect pour les membres de cette Assemblée, qui ne sont pas tous de la même dénomination religieuse ».