La fermeture d’un service d’orthopédagogie pour des enfants handicapés aura de « lourdes conséquences » sur les élèves du centre de services scolaire de Montréal (CSSDM), dénoncent les directions d’école de la métropole. Il est faux de prétendre qu’ils recevront davantage de services, disent-elles.

Dans une lettre envoyée à ses membres, que La Presse a obtenue, l’association qui représente les directions d’école de Montréal désavoue la décision du CSSDM, qui a annoncé la semaine dernière qu’il réaffectera à la prochaine rentrée scolaire 22 orthopédagogues qui viennent en aide à environ 250 élèves handicapés.

« Alors que l’on se tourne vers nous pour annoncer la mauvaise nouvelle aux parents et qu’on voudrait nous faire croire que ces élèves recevront davantage de services, nous devons déplorer que cette décision aux lourdes conséquences ait été prise de façon précipitée et sans réelle consultation », écrivent Kathleen Legault et Stéphane Brunet, présidente et vice-président de l’Association montréalaise des directions d’établissement scolaire (AMDES).

L’association n’a pas souhaité accorder d’entrevue à ce sujet.

C’est le Service de soutien pédagogique à l’intégration des élèves handicapés physiques (SSPI) qui sera aboli. Depuis 40 ans, il est formé d’enseignants qui soutiennent les élèves handicapés qui fréquentent des écoles dites « régulières ». Chaque orthopédagogue se déplace dans plusieurs écoles.

Benoit Thomas, directeur des services éducatifs du CSSDM, explique que les services seront plutôt répartis différemment.

On n’annonce pas de coupure de services, on annonce une optimisation et une réponse plus adéquate aux besoins des élèves. Entre ce que l’AMDES partage et le son de cloche sur le terrain, il y a un décalage.

Benoit Thomas, directeur des services éducatifs du CSSDM

Certains élèves qui sont, par exemple, épileptiques ou diabétiques ne sont pas mieux servis par un orthopédagogue, dit M. Thomas. « Ça va être un préposé qui va l’accompagner dans ses soins au quotidien », explique-t-il. Or, des élèves qui souffrent de dyspraxie ou d’une maladie génétique rare sont aussi accompagnés par ces orthopédagogues.

Les « plus vulnérables des vulnérables » touchés

Critique libérale en matière d’éducation, Marwah Rizqy ne croit pas à la version du CSSDM selon laquelle les services seront maintenus. Il s’agit d’une rupture de service pure et simple, dit-elle.

« Ils disent que le service va être offert en continu partout dans l’école. C’est impossible : présentement, ils ne sont pas capables d’offrir le service à tous les élèves avec les orthopédagogues dans l’école », affirme Mme Rizqy.

Cette décision du centre de services touche « les plus vulnérables des vulnérables », poursuit Marwah Rizqy, qui croit que le CSSDM a peut-être fait le « calcul » que seul un petit nombre d’élèves seraient touchés.

C’est un service individualisé et ce petit deux heures, seul à seul, c’est ça qui fait la différence.

Marwah Rizqy, porte-parole du Parti libéral du Québec en matière d’éducation

À l’Assemblée nationale la semaine dernière, la députée a interpellé à ce sujet le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, en lisant notamment des témoignages de parents inquiets.

« Je prends connaissance à l’instant de cette histoire, je suis touché, et je me propose de m’en saisir […] pour que je puisse vérifier de quoi il s’agit », a répondu le ministre Drainville.

Inquiétudes des parents

La Presse a reçu de nombreux témoignages de parents qui s’inquiètent de la fermeture du service par le CSSDM.

Un père témoigne que « l’orthopédagogue fait le lien avec les profs et permet aussi de suivre le rythme quand [sa fille] manque des cours en raison des rendez-vous médicaux et des soins qu’elle doit recevoir à l’école ou à l’extérieur ».

Plusieurs ont aussi écrit directement au ministre Drainville. Certains témoignent même que c’est le neurologue Lionel Carmant, ministre responsable des Services sociaux, qui a évalué leur enfant.

« Grâce au soutien de l’orthopédagogue, notre fils a pu s’épanouir en environnement scolaire. Avant, il était toujours en situation limite d’échec », écrit une mère.

Le CSSDM dit comprendre l’inquiétude des parents et l’explique notamment par le fait que ces derniers l’ont appris dans un article de La Presse publié la semaine dernière.

« Notre séance de communication a été court-circuitée et là, on est en mode rattrapage. Les parents vont être rencontrés et on va les informer de la situation. On ne laissera pas tomber aucun enfant », dit Benoit Thomas, directeur des services éducatifs du CSSDM.

Lisez « La fermeture “sauvage” d’un service au CSSDM dénoncée »