Pas de casier, la cafétéria fermée la semaine dernière, des jeunes qui perdent des heures de classe parce que les enseignants, comme les élèves, n’ont pas reçu le bon horaire­­­.

Dixit un professeur, « c’est la pagaille » à l’école secondaire Saint-Laurent, cet établissement de Montréal déjà bouleversé depuis février par les accusations d’agressions sexuelles visant un gestionnaire et deux entraîneurs de basketball.

« Cette école devrait être sous tutelle depuis six mois », résume un membre du personnel qui s’est confié à La Presse.

Comme les horaires sont erronés, il arrive que les jeunes soient plus de 50 dans un local prévu pour accueillir 25 élèves. Les adolescents « en trop » sont parfois restés debout à l’arrière de la classe, avant d’être déplacés dans d’autres locaux. Il est aussi arrivé que des surveillants soient appelés en renfort en l’absence d’enseignants qui n’avaient eux-mêmes pas eu le bon horaire ou qui ont refusé de travailler dans de telles conditions.

Pas de cafétéria

Comme la cafétéria n’était pas ouverte la semaine dernière – une nouvelle transmise à la toute dernière minute –, des employés sont allés acheter des aliments dans de grandes surfaces pour les élèves qui ont normalement des repas gratuits en raison de la défavorisation de leurs parents. Et c’est sans compter les élèves qui se promènent avec leurs sacs contenant leurs livres, leur lunch et leurs vêtements pour l’éducation physique – ce qui est interdit en temps normal pour des raisons de sécurité – parce qu’ils n’ont pas eu de casier.

« Plusieurs membres nous ont interpellés », explique David Hamel, président par intérim du Syndicat de l’enseignement de l’Ouest de Montréal.

À partir de la 3e secondaire, poursuit David Hamel, les enseignants n’ont normalement pas plus de 32 élèves à la fois. La semaine dernière, en raison du cafouillage, il confirme qu’il est arrivé que des groupes dépassent 50 élèves.

Le refus d’enseigner n’est pas une consigne, ajoute-t-il, mais le syndicat a conseillé aux professeurs de signifier rapidement le problème à leurs gestionnaires dès qu’il y a pareil dépassement de ratios.

Départ du bras droit du directeur

Selon diverses personnes interrogées, le fouillis vient notamment du départ précipité de Daniel Lacasse, qui n’était pas seulement coach de l’équipe de basketball. Celui qui a été accusé d’agressions sexuelles (tout comme deux autres entraîneurs) s’occupait à la petite semaine des horaires des élèves et des enseignants, de la cafétéria, des tâches de chacun, etc. Il était en fait le bras droit du directeur et le grand manitou administratif de l’école.

Annick Lartigau, présidente du conseil d’établissement de l’école Saint-Laurent, explique elle aussi que l’absence de Daniel Lacasse, qui était au cœur de toute la gestion de l’école, se fait beaucoup ressentir d’un strict point de vue de gestion. Que quelqu’un ait autant les rênes de l’école peut paraître précieux quand tout va bien, note-t-elle, mais quand il n’est plus là et que le transfert des connaissances ne s’est pas fait, c’est très compliqué.

M. Lacasse se retrouvant devant les tribunaux, les horaires des élèves et des enseignants ont été confiés à des programmeurs informatiques, selon ce que Mme Lartigau a su. Il appert que « la programmation informatique a ses limites » et que les programmeurs n’avaient pas en main toutes les subtilités de l’école (qui est entre autres divisée en deux bâtiments entre lesquels des enseignants peuvent être appelés à se déplacer).

Les horaires auraient été remis à la dernière minute à la direction, qui a constaté maintes erreurs, sans avoir le temps de les corriger.

Aucune entrevue avec le centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys (CSSMB) ni avec la direction de l’école Saint-Laurent n’a été possible. La réponse est venue par courriel.

Le service des médias a souligné qu’« une rentrée scolaire au secondaire est une opération complexe qui nécessite de multiples ajustements. À l’école secondaire Saint-Laurent comme dans les autres écoles de grande envergure, une période d’adaptation est nécessaire, notamment au niveau des horaires des membres du personnel », peut-on lire dans le courriel transmis par Chrystine Loriaux, directrice des communications du CSSMB.

Le CSSMB ajoute que 80 nouveaux élèves se sont inscrits tardivement, que l’école accueille 130 élèves de plus cette année, etc.

Sur le site internet du conseil d’établissement de l’école Saint-Laurent, on ne trouve pas par ailleurs le nom des personnes qui le constituent et dans la journée de lundi, aucun procès-verbal n’y était publié depuis mai 2021. Sa présidente, Mme Lartigau, assure que tout a été fait à temps et en tout respect des lois, mais que le centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys a aussi eu des problèmes informatiques de ce côté.

Le centre de services scolaire a fait savoir en après-midi mardi que « ces documents nécessitaient une signature avant d’être mis en ligne » et que cela allait être fait imminemment.

Avec Alice Girard-Bossé, La Presse

En savoir plus
  • 2200
    Nombre approximatif d’élèves à l’école secondaire Saint-Laurent (dans l’arrondissement de Saint-Laurent, à Montréal)
    SourcE : Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys