« Il n’est pas question pour notre gouvernement de tolérer un contournement de la Charte de la langue française. Nous sommes prêts à faire des modifications législatives si la situation l’exige », a déclaré jeudi Jean-François Roberge, ministre de l’Éducation.

Il réagissait ainsi à la mise en place prochaine d’un programme scolaire s’étalant sur 12 ans – comme dans les autres provinces canadiennes – d’une école privée anglophone qui pourrait ainsi éviter à ses élèves d’aller au cégep.

Dans un reportage diffusé plus tôt cette semaine à Global News, Joan Salette, directrice de l’Académie Kuper, à Kirkland, à l’ouest de Montréal, expliquait avoir reçu beaucoup de messages appuyant cette démarche, particulièrement dans la foulée de la promulgation de la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français (projet de loi 96).

En vertu de cette nouvelle loi – très décriée par certains anglophones au Québec –, les jeunes anglophones devront suivre obligatoirement trois cours de français au cégep.

Le programme que s’apprête à créer l’Académie Kuper (une école privée non subventionnée dont les droits de scolarité s’élèvent à plus de 16 000 $ au secondaire) permettrait à ses élèves d’éviter d’aller au cégep, où ils seront soumis aux nouvelles obligations en matière de langue.

Au ministère de l’Éducation, Bryan St-Louis, responsable des relations de presse, a indiqué qu’« il est illégal de faire la promotion de ce programme comme étant un programme reconnu par le gouvernement du Québec ».

« Ces programmes de 12e année ne sont pas autorisés ni par le ministère de l’Éducation ni par celui de l’Enseignement supérieur. Ainsi, la qualité de ces programmes n’est pas du tout encadrée, et le Québec ne décerne aucun diplôme pour eux », a poursuivi Bryan St-Louis.

L’Académie Kuper n’a pas rappelé La Presse.

Pas un cas isolé

Sur son site internet, l’établissement, qui existe depuis 1986, se décrit comme « la plus grosse école secondaire privée anglophone du Québec ».

Elle dit suivre « les règles des ministères de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur » et avoir un permis du ministère de l’Éducation.

Tino Bordonaro, président de la Commission de l’éducation en langue anglaise, a indiqué à La Presse qu’à sa connaissance, au moins six autres écoles privées anglophones avaient de tels programmes au Québec. Certains d’entre eux remontent à plusieurs années et leurs frais de scolarité dépassent 15 000 $.

Y a-t-il là une brèche qui pourrait être utilisée par la communauté anglophone ? En tout cas, vérification faite auprès des commissions scolaires anglophones de Montréal, tant English-Montréal que Lester-B.-Pearson indiquent n’avoir aucune intention de mettre en place de tels cursus s’étalant sur 12 ans dans leurs écoles publiques.

Les collèges privés français Marie de France et Stanislas – calqués, eux, sur le système scolaire français – offrent aussi un programme permettant à leurs élèves de passer directement à l’université sans passer par le cégep en vertu d’ententes de longue date.