Des projets d’agrandissement d’écoles ont connu des dépassements de coûts de 100 % par rapport aux prévisions, si bien qu’en un an, le gouvernement a dû payer 424 millions de dollars de plus que ce qu’il avait initialement prévu. La surchauffe dans le domaine de la construction est en bonne partie responsable de cette hausse.

Ceux qui se sont lancés dans des rénovations ces dernières années ont pu voir à quel point les prix dans ce secteur ont augmenté. Pour l’agrandissement et la construction d’écoles, les contribuables québécois ont une facture collective qui grimpe de 424 millions, résultat de 61 demandes de « contribution additionnelle » que les centres de services scolaires ont faites au ministère de l’Éducation depuis le 1er mars 2021.

Au seul centre de services scolaire de Laval (CSSDL), le gouvernement a dû payer près de 57 millions de plus que prévu pour cinq projets. Parmi ceux-ci figure la construction d’une école spécialisée pour élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation, dont le budget est passé de 26 à 48 millions de dollars.

Au centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys (CSSMB), à Montréal, c’est 30 millions de plus que Québec a dû sortir des coffres pour quatre projets.

L’agrandissement de l’école primaire Saint-Louis de Pointe-Claire, par exemple, a coûté le double de ce qui était prévu au Plan québécois des infrastructures (2019-2029).

Pour l’ajout de 12 classes et d’un gymnase double, le plus bas soumissionnaire demandait 19,9 millions, soit 9,9 millions de plus que ce qui était inscrit au PQI deux ans plus tôt. Québec a autorisé le financement additionnel l’automne dernier.

Au ministère de l’Éducation, on dit que les 424 millions supplémentaires déboursés en un an s’expliquent par de « multiples raisons », dont « l’ajout de classes ou d’espaces communs en cours de projet […] des conditions spéciales de sites, l’ajout de travaux de maintien d’actifs […], les conditions actuelles du marché de la construction ou d’autres éléments imprévus sur lesquels le Ministère n’a aucun contrôle ».

Le CSSMB constate de son côté que « la valeur des projets est en hausse importante au cours des derniers mois ».

Le nombre de soumissions reçues (jusqu’à sept pour un projet) confirme que les coûts représentent bien le marché actuel.

Annie Bourassa, porte-parole du centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys

Chaque fois que des chantiers majeurs sont effectués dans des écoles, précise-t-elle, le centre de services en profite pour faire des travaux en maintien d’actifs, pour « limiter les impacts » sur les élèves.

Sur les 19 millions consacrés à l’agrandissement de l’école Paul-Gérin-Lajoie-d’Outremont, 3 millions sont consacrés à maintenir le bâtiment existant en état. Pour ce projet, le Ministère a autorisé un financement additionnel de près de 8 millions de dollars par rapport à ce qui avait été établi deux ans plus tôt.

Hausse du coût des matériaux

Pour expliquer l’explosion du coût de certains projets, le centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys cite notamment la hausse du prix des matières premières, comme l’acier et le bois, mais aussi « l’augmentation fulgurante des prix liés aux murs-rideaux [fenêtres], soit près de 40 % au cours des derniers mois ».

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Yves Michel Volcy, directeur général du centre de services scolaire de Laval

Le centre de services scolaire de Laval a une explication semblable. « Avec la surchauffe que connaît le domaine de la construction, et ce, particulièrement dans la grande région métropolitaine, nous avons été contraints de revoir à la hausse certains budgets pour mener à bien nos projets de construction d’écoles », écrit Yves Michel Volcy, directeur général du CSSDL.

Avant même la pandémie, les coûts de construction augmentaient au Québec. En 2019, des projets d’agrandissement et de rénovation d’écoles coûtaient 30 % de plus que prévu.

Trois ans plus tard, c’est toujours « très volatil et très complexe » dans l’industrie, explique Guillaume Houle, porte-parole de l’Association de la construction du Québec (ACQ).

Entre octobre 2020 et octobre 2021, dit-il, le coût du pétrole et des métaux ferreux ont augmenté de près de 75 %.

« Pétrole égale tout ce qui est fait de plastique, carburant pour la machinerie lourde. Quant aux métaux ferreux, on peut penser à tout ce qui est en acier dans un projet [de construction] », dit M. Houle.

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La construction de deux plateaux sportifs à l’école secondaire Saint-Maxime, à Laval, coûtera 7,6 millions de plus que ce que prévoyait le budget initial.

Alors que l’effet de la pandémie pourrait commencer à s’estomper, vient s’ajouter la guerre en Ukraine, qui prive le monde de la construction de matériaux russes et ukrainiens. « Ça crée une pression sur l’offre en ce moment », observe Guillaume Houle.

Malgré la hausse des coûts des projets, le Ministère estime que, « considérant les besoins d’espace observés dans le réseau, la réalisation des projets déjà autorisés est essentielle ».

Des projets dont les coûts augmentent

Construction de deux plateaux sportifs superposés à l’école secondaire Saint-Maxime, à Laval :

  • Budget initial : 13,4 millions
  • Budget révisé : 21 millions

Conversion d’un bâtiment au 2100, rue Cunard (Laval) en centres de formation professionnelle et d’éducation des adultes :

  • Budget initial : 39,7 millions
  • Budget révisé : 61,3 millions

Source : CSSDL