« Biaisée » et source d’anxiété chez les élèves, la cote R doit faire l’objet d’une « enquête rigoureuse », un premier pas vers une réforme des processus d’admission à l’université, réclame la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ).

« Il est plus que temps de reconnaître que la population étudiante collégiale vaut plus qu’une simple cote qui la réduit à ses performances académiques », conclut l’avis sur les processus de sélection aux programmes contingentés du baccalauréat diffusé par la FECQ et obtenu par La Presse.

En pleine période d’inscription pour le trimestre d’automne 2022, la FECQ fait 11 recommandations aux universités québécoises et au ministère de l’Enseignement supérieur dans le cadre « d’une longue démarche pour la modernisation des admissions universitaires ».

Elle réclame avant tout une « enquête rigoureuse » de la cote de rendement collégial, qui soit indépendante du Bureau de coopération interuniversitaire (BCI).

La cote R évalue la force relative d’un élève par rapport à ses pairs, à l’échelle de la province. Révisé en 2017, son calcul fait l’objet de critiques de la part d’acteurs du milieu collégial. Une simulation réalisée par la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN) en 2019, et sur laquelle s’appuie la FECQ, décèle une « variation importante » de la cote R selon la force du groupe.

Ainsi, les élèves issus d’un groupe homogène fort seraient avantagés par le calcul actuel. À moyenne égale, les élèves appartenant à un groupe homogène faible se verraient attribuer une cote plus faible.

D’après la FECQ, il est « impossible » de certifier que la cote R « n’avantage ni ne désavantage aucun groupe, aucun programme, ni aucun établissement collégial » comme l’affirme le BCI.

C’est d’autant plus vrai qu’au cours des deux dernières années, la formation s’est articulée parfois à distance, parfois en présentiel, de sorte qu’il est inapproprié d’évaluer les élèves selon un même barème, indique l’avis.

« La cote de rendement collégial perd complètement son sens et son caractère soi-disant équitable lorsque la formation est à géométrie variable dans le réseau collégial du Québec », tranche la FECQ.

Continuer d’utiliser un outil pour lequel les doutes sur sa fiabilité et son objectivité se répandent auprès de l’ensemble du réseau collégial à vue d’œil semble irraisonnable.

Extrait de l’avis de la FECQ

Elle emboîte ainsi le pas à la FNEEQ-CSN, qui avait plaidé en 2019 pour l’instauration d’un moratoire sur le nouveau calcul de la cote R, le temps que des analyses « rigoureuses et exhaustives puissent faire la lumière sur ses impacts ».

Une source d’anxiété

Anxiété de performance, comparaison entre pairs, perception négative de soi : la cote R affecte aussi la santé mentale des étudiants, note l’avis.

PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE

Samuel Vaillancourt, président de la FECQ

« La cote R est sur les lèvres de l’ensemble des étudiants. On voit l’anxiété que ça leur apporte. C’est un indice de réussite académique, mais pas de la valeur d’un individu », souligne le président de la FECQ, Samuel Vaillancourt.

C’est pourquoi la FECQ presse les universités de diminuer le poids de la cote R dans l’examen des candidatures, alors que 60 % des programmes contingentés sélectionnent leurs étudiants sur l’unique base du dossier scolaire (cote R et moyenne des cours).

Juger la valeur d’une personne candidate sur un modèle mathématique est désuet. Réduire une personne étudiante qui a une histoire, un bagage, des aptitudes sociales, des intérêts, des expériences et, surtout, du potentiel, à un simple nombre n’est plus actuel.

Extrait de l’avis de la FECQ

Au-delà de la cote R, les recommandations de la FECQ s’inscrivent dans un plan plus large de réforme des processus d’admission universitaires.

L’avis exhorte les universités québécoises à adopter une diversité de processus de sélection aux programmes contingentés, afin d’éviter les biais et de tendre vers « une accessibilité universelle aux études universitaires ». Elle cite en exemple les entrevues, les lettres de motivation, les tests de jugement situationnel, les portfolios et les expériences pratiques.

Pour favoriser une sélection « plus humaine » des candidatures, la mise en place d’une cote R « seuil », au-dessus de laquelle tous les candidats sont égaux, est aussi vivement suggérée.

La FECQ sollicite finalement le ministère de l’Enseignement supérieur pour mettre en place une table d’échanges sur l’orientation au collégial, et nationaliser un cours complémentaire en orientation ainsi qu’un test psychométrique orientant.