Parents et élèves devront se préparer à toute éventualité lundi, lorsque les écoles rouvriront. Si la COVID-19 force des membres du personnel à s’isoler, leur absence pourrait entraîner des ruptures de services, préviennent les centres de services scolaires.

« Comme dans le système de la santé », la Fédération des centres de services scolaires se prépare à prioriser certains services dans les écoles en cas de manque de personnel en raison de la COVID-19.

Le scénario est « hypothétique », dit sa présidente, Caroline Dupré, mais on pourrait par exemple décider d’accueillir seulement les plus jeunes élèves dans un service de garde si les éducatrices viennent à manquer.

Les parents pourraient être avisés un matin que l’autobus scolaire de leur enfant ne sera pas au rendez-vous parce que le chauffeur est malade.

Pour l’enseignement, un « modèle hybride » pourrait parfois s’imposer. Caroline Dupré cite par exemple le cas où une enseignante doit s’isoler parce qu’elle a été en contact avec un cas de COVID-19.

« On est rendus très habiles dans l’enseignement à distance », dit-elle, et cela pourrait se refléter dans l’organisation des services dans les écoles.

Au centre de services scolaire de la Pointe-de-l’Île, à Montréal, on examine « différents scénarios » en cas d’absentéisme élevé chez les profs.

Plusieurs écoles ont prévu des grilles de remplacement d’urgence dans les tâches des enseignants et nous explorons la possibilité, au besoin, d’utiliser d’autres corps d’emploi pour effectuer des remplacements sporadiques advenant une situation de bris de services.

Valérie Biron, porte-parole du centre de services scolaire de la Pointe-de-l’Île

À quelques jours de la réouverture des écoles, de nombreuses questions subsistent, dit la présidente de l’Association montréalaise des directions d’établissement scolaire (AMDES), Kathleen Legault.

« On a un certain nombre de suppléants : doit-on les assigner à un endroit particulier ? Peut-on mettre un éducateur spécialisé devant la classe si on manque d’enseignants ? », demande Mme Legault. « On ne sait pas c’est quoi la vision du ministre », ajoute-t-elle.

Combien d’absents ?

Déjà, « même en enseignement à distance, il manque de joueurs », observe Nicolas Prévost, président de la Fédération québécoise des directions d’établissement d’enseignement (FQDE).

En France, où la rentrée scolaire a eu lieu le 3 janvier, on rapportait deux jours plus tard que 7 % des enseignants étaient absents. Le ministre de l’Éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, estimait que le pic d’absences « ne devrait pas dépasser normalement 15 % ».

Y a-t-il de telles prévisions pour les écoles du Québec ? Il n’a pas été possible d’obtenir la réponse à cette question auprès du Ministère, mercredi, mais la présidente de l’AMDES croit que « ces données-là n’ont pas été colligées ».

Chez les directions d’école comme à la Fédération des centres de services scolaires, on évoque une confusion quant à la période d’isolement du personnel.

Rouvrir les écoles, multiplier les mesures

Delphine Collin-Vézina, professeure à l’École de service social de l’Université McGill, croit qu’il est temps de rouvrir les écoles. Après deux ans de pandémie, « les recherches sont assez nombreuses à travers le monde pour témoigner d’une augmentation des problèmes de santé mentale chez les enfants et les adolescents ».

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Delphine Collin-Vézina, professeure à l’École de service social de l’Université McGill

Les jeunes ont beau avoir une capacité d’adaptation, la professeure s’inquiète d’enfants qui sont dans des familles « où il y a de la violence, des problèmes de santé mentale, de l’abus de substances ».

« On ne peut pas exiger de ces enfants qu’ils développent seuls leur résilience », dit la Dre Collin-Vézina, qui rappelle que tous ne sont pas égaux face à la pandémie.

Delphine Collin-Vézina dit toutefois qu’elle aimerait voir une « vraie stratégie » pour s’assurer que l’école reste ouverte. Ouvrir et fermer les écoles à répétition a aussi un impact sur les enfants, observe-t-elle.

Le DJesse Papenburg, infectiologue pédiatrique et microbiologiste médical à l’Hôpital de Montréal pour enfants, est aussi en faveur de la réouverture des écoles. Quand on lui demande quelles mesures il préconiserait dans l’idéal, il cite une vaste étude de l’Université Johns Hopkins, qui a montré que « ce n’est pas une intervention dans le milieu scolaire qui rend le milieu sécuritaire », mais bien l’addition de plusieurs mesures.

Le port du masque, l’aération, le fait de manger avec un groupe stable, le dépistage avant d’entrer à l’école et l’annulation des activités parascolaires en font partie.

Il n’y a pas UN outil qui va faire la différence, il faut en faire le plus possible. Si on le fait, on réussit à faire en sorte que les écoles sont des endroits sécuritaires pour les enfants et les familles des enfants.

Le DJesse Papenburg, infectiologue pédiatrique et microbiologiste médical à l’Hôpital de Montréal pour enfants

Il insiste néanmoins sur l’importance de la vaccination. Le personnel doit aller chercher sa troisième dose, dit-il, et il faut continuer d’encourager les familles des enfants de 5 à 11 ans à y aller. À Montréal et à Laval, par exemple, le taux de vaccination dans ce groupe d’âge est de 50 %.

« Il faudrait vraiment faire des efforts sur le terrain pour encourager les familles à faire vacciner les enfants avec une première dose, parce qu’on voit que ça protège contre l’hospitalisation, même avec Omicron », dit le DPapenburg.

Dans ce contexte, l’infectiologue croit que le retour des bulles-classes au primaire serait préférable. Au ministère de la Santé et des Services sociaux, on dit avoir jugé qu’il n’est pas « justifié de remettre cette mesure en vigueur » parce que « les élèves du secondaire ont reçu deux doses de vaccin et les élèves du primaire, une dose ».

« Il faut prendre en considération que les bulles-classes ont quand même des impacts sur l’expérience des enfants à l’école », écrit Marie-Hélène Émond, porte-parole du Ministère.