(Québec) Québec débloque 64 millions pour former et retenir des éducateurs qualifiés dans le réseau des services de garde éducatifs à l’enfance. Le gouvernement Legault espère « accroître le niveau de scolarisation » de quelque 2400 éducateurs en offrant une formation rémunérée.

Le ministre de la Famille, Mathieu Lacombe, et le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Jean Boulet, ont présenté lundi une série de mesures pour répondre à la demande de main-d’œuvre qualifiée dans le réseau des services de garde éducatifs à l’enfance, affecté par une pénurie importante d’employés.

« La rareté de main-d’œuvre s’est transformée en pénurie de main-d’œuvre » pendant la pandémie de la COVID-19, a fait valoir le ministre Lacombe.

Québec versera 45 millions pour offrir un Programme de formations de courte durée (COUD) visant la formation d’éducateurs déjà au travail dans le réseau. La formation, qui mène à l’obtention d’une attestation d’études collégiales (AEC) en Techniques d’éducation à l’enfance, sera rémunérée jusqu’à concurrence de 15 $ l’heure (jusqu’à 15 000 $ par personne). Elle comportera une formation théorique de 735 heures ainsi qu’un stage en milieu de travail de 245 heures, pour un total de 975 heures de formation.

« C’est intéressant parce qu’on travaille et on étudie en même temps », a fait valoir le ministre Jean Boulet. Ce dernier explique que ce genre de formation de courte durée et en alternance travail-études est une avenue intéressante pour combler les besoins de main-d’œuvre exacerbée par la pandémie. Il souligne que les programmes de formation de courte durée offrent un taux de diplomation autour de 85 %.

La formation rémunérée sera offerte dans plusieurs collèges et répondra « aux besoins de relève à court terme en permettant aux participants d’être employés par un service de garde pour travailler et étudier en même temps ». Ce projet permettra de former 2400 éducatrices et éducateurs sur une période de trois ans. Il est déjà offert dans certaines régions comme la Côte-Nord et la Montérégie.

Le ministre Lacombe n’y voit pas là une sorte de voie rapide pour dénicher de la main-d’œuvre moins qualifiée. « Ce n’est pas quelque chose qui m’inquiète », a-t-il fait valoir, soulignant que « les cours spécifiques » de l’AEC sont « à peu près les mêmes » que ceux offerts dans la technique. L’AEC est aussi combiné à une expérience de travail, a-t-il souligné. Évidemment, « la technique est toujours la voie privilégiée », a-t-il nuancé.

On estime qu’en 2024, il y aura une demande minimale non comblée d’environ 10 300 éducatrices ou éducateurs pour pourvoir des postes vacants et effectuer des remplacements dans les centres de la petite enfance et les garderies.

Quelque 11,6 millions de l’enveloppe iront aussi à l’octroi de bourses d’études de 2300 $ pour la réussite des premier et deuxième stages des étudiants en programme Techniques d’éducation à l’enfance, cette fois. Québec allonge également 5 millions pour des mesures de « valorisation et promotion du métier d’éducateur ».

Accueil en demi-teinte

La Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN) a salué la mise en place d’un programme de formation de courte durée, mais s’inquiète du même souffle « d’une potentielle remise en question, à long terme, de la formation de base exigée pour les travailleuses et les travailleurs des services de garde éducatifs à l’enfance. » Le syndicat estime que ces mesures doivent être temporaires.

« Après des années de négligence et de sous-financement des services de garde éducatifs à l’enfance, on se voit aujourd’hui contraint d’apporter des solutions dans l’urgence. Les mesures temporaires annoncées aujourd’hui ne pourront jamais se substituer aux véritables solutions aux problèmes de rareté de main-d’œuvre : des augmentations de salaire tangibles et une amélioration concrète des conditions d’exercice de la profession », a indiqué la FSSS-CSN dans un communiqué.

La Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec (FIPEQ-CSQ) a aussi dit voir d’un œil favorable les mesures annoncées lundi. Par contre, le syndicat « voit avec beaucoup de scepticisme comment cette solution pourra arrêter l’hémorragie sans précédent dans le réseau de la petite enfance. » Pour la FIPEQ-CSQ, « la solution passe plutôt par la rétention du personnel éducatif en place à court terme, grâce à une amélioration des conditions de travail et une bonification des salaires, ce qui assurera aussi la perpétuation de services de qualité qui semblent tenir à cœur au ministre de la Famille ».