Dans une campagne portée par le mot-clic #papauqam, des diplômées dénoncent l’« hypocrisie » de leur alma mater. Elles sont auteures, chercheuses, boursières ou doctorantes et posent en sous-vêtements aux côtés du logo de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) ou de leur diplôme pour soutenir Hélène Boudreau, étudiante actuellement poursuivie par l’université.

« Papa UQAM, tu dois comprendre que tes étudiantes ont des corps, ont des sexualités et que pour plusieurs d’entre elles, le corps nourrit le travail intellectuel », écrit Cato Fortin, l’une des instigatrices du mouvement et lauréate de la bourse Joseph-Armand-Bombardier pour son projet de thèse de doctorat.

Selon Mme Fortin, la poursuite intentée par l’Université contre son étudiante nuit à toutes les travailleuses du sexe, aux femmes et aux personnes queer en général.

C’est à la fois hypocrite et ironique. Ça instaure un climat de surveillance.

Cato Fortin, à La Presse

L’UQAM poursuit Hélène Boudreau pour 125 000 $ en lien avec des photos explicites accompagnées du logo de l’établissement publiées par l’étudiante, notamment sur OnlyFans. Cette plateforme est surtout utilisée pour partager du contenu suggestif en échange d’une cotisation mensuelle.

« Aberrant »

De nombreuses femmes ont riposté à cette poursuite jugée injuste. Elles ont publié à leur tour sur les réseaux sociaux des clichés d’elles partiellement dénudées, le logo de l’UQAM bien en vue.

PHOTO TIRÉE D’INSTAGRAM

Une des nombreuses photos publiées en ligne pour soutenir Hélène Boudreau

« L’UQAM profite de toutes ces recherches et de la trace laissée par ces femmes. C’est aberrant de voir qu’on met autant d’énergie à poursuivre une étudiante, alors que l’UQAM rayonne grâce aux études féministes et à l’œuvre de certaines travailleuses du sexe », estime Mme Fortin.

« Moi aussi, je suis diplômée de l’UQAM. J’ai payé mes études en travaillant comme escorte et serveuse sexy. Les travailleuses du sexe méritent le respect », dénonce sur son compte Instagram Mélodie Nelson, auteure et diplômée de l’UQAM.

« On s’attendrait à ce que l’établissement reconnaisse que les travailleuses du sexe ont le droit d’utiliser leur corps comme elles le désirent. Je trouve ça tiré par les cheveux de dire que sa photo nuisait à la réputation de l’université, sachant que des auteures comme Nelly Arcan qui sont passées par là étaient aussi des travailleuses du sexe », martèle Hélène Bughin, candidate au doctorat et participante au mouvement. Elle considère la poursuite comme un geste réducteur et un manque de considération.

Dans une déclaration sous serment transmise aux médias jeudi, Mme Boudreau s’était défendue en affirmant que « dans notre société moderne, le fait qu’une femme se révèle, partiellement ou autrement, sur une photo, alors que le photographe l’y a autorisée et qu’elle a payé pour acquérir ces photos, ne devrait pas être qualifié d’acte pouvant porter atteinte à la réputation ».