(Québec) C’était la promesse phare de la Coalition avenir Québec (CAQ) pour laquelle François Legault avait mis son siège en jeu. Finalement, ce n’était que des « paroles en l’air », lance Marwah Rizqy.

La porte-parole libérale en éducation a réagi jeudi à l’annonce du gouvernement Legault selon laquelle il mettra deux ans de plus que prévu pour créer 2600 classes de maternelle quatre ans.

Elle signale que les parents sont les grands perdants, puisque les deux ministres qui les représentent, Jean-François Roberge (Éducation) et Mathieu Lacombe (Famille), n’ont pas su livrer la marchandise.

Il y a deux semaines, M. Lacombe a déclaré qu’il était arrivé au bout de ses capacités à développer le réseau des centres de la petite enfance (CPE), alors que la liste d’attente compte près de 50 000 enfants.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Marwah Rizqy

Concernant les maternelles quatre ans, le ministère de l’Éducation a publié un bref communiqué mercredi à 17 h pour annoncer qu’il « prévoit maintenant l’ouverture de toutes les classes prévues d’ici 2025-2026 ».

Le ministère cite notamment « la disponibilité des locaux et de la main-d’œuvre » pour expliquer ce retard.

Rappelons qu’en campagne électorale, la CAQ avait promis d’ouvrir 5000 classes de maternelles quatre ans durant son mandat. Ce chiffre est ensuite passé à 3400, puis à 2600.

En parallèle, l’estimation du coût de construction a explosé. Le montant moyen pour créer une nouvelle classe de maternelle quatre ans, estimé à 120 000 $ par la CAQ en 2018, est finalement de 800 000 $.

Selon Mme Rizqy, les faits ont rattrapé la CAQ.

« Ils étaient dans un monde parallèle au nôtre. Eux autres, la pénurie d’enseignants, ils l’ont niée. Pénurie de locaux, ils l’ont niée. Aujourd’hui, les faits sont têtus et les rattrapent », a-t-elle déclaré.

« Non seulement il n’y a pas de places en maternelles quatre ans, pire, la liste d’attente en CPE, elle s’est allongée. Les deux ministres en famille et en éducation ont failli aux parents », a-t-elle ajouté.

Elle rappelle que les libéraux sont en faveur du déploiement des maternelles quatre ans, mais de façon progressive et selon les besoins. « Pas du mur-à-mur comme la CAQ le proposait. »

Mme Rizqy croit que le premier ministre a lancé des paroles en l’air. « Si ce n’était pas des paroles en l’air, il l’aurait attaché bien comme il faut, son projet de maternelles quatre ans. »

M. Legault martèle depuis des mois que toutes les promesses de la CAQ seront réalisées, malgré la pandémie de COVID-19 qui sévit.

Le 28 janvier dernier, il déclarait : « Toutes les promesses électorales qu’on a faites, […] on va quand même être capables de les respecter, […] entre autres, […] le développement des maternelles quatre ans. »

Bonne nouvelle, dit Labrie

Le recul de la CAQ est plutôt une bonne nouvelle, réagit quant à elle la porte-parole de Québec solidaire en éducation, Christine Labrie.

« C’est définitivement une promesse électorale brisée, mais c’était une mauvaise promesse. Je pense que la décision à prendre, c’était celle-là », dit-elle en entrevue.

« Ce n’était pas normal que la CAQ se lance dans le projet des maternelles quatre ans, alors qu’on peine en ce moment à mettre un enseignant devant chacun des groupes.

« Je trouve que c’est une bonne nouvelle qu’ils s’en soient enfin rendus compte. »

Selon Mme Labrie, la maternelle quatre ans a toujours été un projet « partisan » qui ne répondait pas aux véritables besoins du réseau. Il aurait plutôt fallu développer le réseau des services de garde, dit-elle.

« L’énergie a été mise à la mauvaise place. C’est du temps perdu. »

Le bureau de Roberge se défend

La pandémie de la COVID-19 a « chambardé » les plans dans plusieurs secteurs d’activités, répond le directeur stratégique du ministre de l’Éducation, Jean-François Del Torchio.

« Malgré tout, nous maintenons notre objectif d’offrir 2600 places en maternelle quatre ans, mais nous allons prendre un peu plus de temps pour le réaliser.

« Il s’agit d’une initiative importante pour détecter les troubles d’apprentissage et nous allons travailler avec le réseau scolaire pour continuer l’implantation », a-t-il déclaré.

La CAQ s’enlise, selon Hivon

La députée péquiste de Joliette, Véronique Hivon, croit que le gouvernement de la CAQ s’enlise. Elle l’invite à reconnaître ses erreurs et à mettre le projet des maternelles quatre ans sur la glace.

« Le gouvernement aurait pu dire : « Écoutez, on a fait fausse route. On a trop misé sur la seule maternelle quatre ans et […] on va mettre le projet sur la glace le temps d’être capable de répondre à d’autres urgences que sont les places en CPE, les services aux élèves, le fait d’avoir un enseignant dans la classe ». »