(Québec) Plus du tiers des fontaines et des robinets des écoles publiques du Québec – au-delà de la moitié dans certaines régions – contenaient trop de plomb, révèlent les résultats du dépistage massif mené au cours des derniers mois. Ces points d’eau ont été fermés ou réparés, selon Québec.

Le gouvernement a choisi de diffuser en fin d’après-midi vendredi le bilan de l’opération de dépistage du plomb dans l’eau des écoles. L’opération, qui a duré un an et demi, visait à déterminer si les « points d’eau » des écoles respectent la nouvelle recommandation de Santé Canada quant à la concentration du plomb (cinq microgrammes par litre d’eau).

Le test a été fait dans les quelque 3200 écoles des centres de services scolaires. Dans les 2348 établissements primaires, 33 % des points d’eau étaient non conformes. Dans les 845 écoles secondaires, c’est 43 %. Ainsi, 36 % des points d’eau de l’ensemble des établissements (26 531 sur 73 063) ne respectaient pas la norme. Ils ont « aussitôt été sécurisés ou réparés », selon le ministère de l’Éducation.

La proportion de points d’eau non conformes a même atteint 46,2 % au centre de services scolaire (CSS) de Montréal, 49,5 % au CSS des Laurentides, 57,9 % au CSS Marguerite-Bourgeoys, 58,7 % au CSS de Saint-Hyacinthe, 71,4 % au CSS de Sorel-Tracy et 74,8 % au CSS de la Vallée-des-Tisserands.

Dans les écoles privées, le bilan est meilleur : 15 % des points d’eau étaient non conformes.

« Selon les directives du Ministère, les établissements devaient faire des interventions immédiates pour sécuriser les points d’eau lorsqu’une mesure de concentration de plomb ne respectait pas le nouveau critère de 5 μg/L. Tous les points d’eau dépassant ce critère ont été sécurisés, soit par leur fermeture, soit par l’installation de filtres ou encore par la mise en place d’une procédure de rinçage préventif », indique le rapport.

« Le Ministère a aussi demandé au réseau des établissements scolaires de mettre en place des interventions correctives à moyen terme (installation de filtres) et à long terme (remplacement de plomberie) pour corriger définitivement tous les points d’eau jugés non conformes. » Toujours selon le document, « les résultats de ces correctifs se refléteront en 2022, dans le cadre de la prochaine reddition de comptes ».

« On n’est pas vraiment étonné »

La présidente de l’Alliance des professeures et professeurs de Montréal, Catherine Beauvais-St-Pierre, n’était pas surprise en prenant compte des chiffres dévoilés par Québec.

« On n’est pas vraiment étonné. On sait que notre parc immobilier doit majoritairement être mis à jour », déclare-t-elle, en entrevue avec La Presse. Elle raconte avoir vu des fontaines d’eau inaccessibles dans les écoles où elle a enseigné, mais aussi dans celle que fréquente sa fille. « Ce n’était pas un secret pour personne », renchérit-elle.

Mme Beauvais-St-Pierre estime toutefois que les chiffres sont « assez exorbitants ».

Patricia Clermont, porte-parole du mouvement Je protège mon école publique et membre du conseil d’établissement de deux écoles du Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM), voit dans cette annonce « un peu de désintérêt envers ces questions de santé publique ».

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Patricia Clermont, porte-parole du mouvement Je protège mon école publique

« Je trouve ça vraiment ordinaire de sortir ça un vendredi après-midi. Je suis déçue de la façon dont on traite ce genre de chose, qui pourtant, au quotidien, influe sur la santé de nos enfants [et] de notre personnel », affirme-t-elle.

Je ne peux pas m’empêcher de remarquer la différence entre ce qui se passe dans les écoles privées, qui ont une gestion autonome, et celles de nos écoles publiques dont on [dit] qu’elles sont dans nos priorités nationales.

Patricia Clermont, porte-parole du mouvement Je protège mon école publique

Les deux femmes s’entendent sur le fait qu’un plan est nécessaire afin de remédier à la présence du plomb dans l’eau.

« C’est encore un dossier où il va falloir une volonté politique claire », estime Catherine Beauvais-St-Pierre.

Patricia Clermont croit cependant qu’il est primordial de tenir les parents au courant de ce genre de situation. « Des fois j’ai l’impression qu’on veut rassurer les gens, alors que ce n’est pas comme ça qu’on va régler ces problèmes-là. C’est en les constatant et en s’en occupant », évoque-t-elle.

L’Association québécoise du personnel de direction des écoles affirme « ne pas avoir eu vent de la situation » et qu’un suivi sera effectué auprès de ses membres lundi.

La Fédération des comités de parents du Québec n’a pas souhaité se prononcer sur la question vendredi.