(Montréal) Le nombre d’enfants qui se feront faire l’école à la maison par leurs parents a connu un bond important pour la rentrée 2020, qui se fait à l’ombre de la pandémie de COVID-19 : alors qu’ils étaient un peu moins de 6000 l’an dernier, ils seront environ 10 000 cet automne.

Ces chiffres ont été fournis jeudi à un juge par l’une des avocates de Procureur général du Québec dans le cadre d’un litige en éducation. Plus précisément, ils étaient 5964 l’an dernier et 9634 cette année : ce dernier chiffre devrait être maintenant plus élevé, des enfants s’étant ajoutés depuis la dernière compilation.

Les parents ont depuis des années l’option de retirer leur enfant de l’école pour s’occuper de leur éducation scolaire eux-mêmes.

Il n’est pas question ici des cours en ligne offerts par les écoles aux élèves qui ont une condition médicale pour laquelle ils ont obtenu une exemption d’aller en classe. Il s’agit d’enfants retirés de l’école et pour lesquels les parents deviennent responsables de l’enseignement, en ayant établi eux-mêmes un plan d’apprentissage à la maison. Leur programme est suivi par le ministère de l’Éducation et des évaluations de leurs apprentissages ont lieu tous les ans.

Ces chiffres n’ont pas surpris Marine Dumond, présidente de l’Association québécoise de l’éducation à domicile (AQED).

Le nombre de membres de l’Association a aussi explosé : avant la pandémie, ils étaient 850, mais le total vient de doubler pour dépasser 1700. Comme les membres sont des familles — qui ont souvent plus d’un enfant — cela signifie que le nombre de jeunes recevant l’éducation à la maison est bien sûr plus élevé.

L’organisation citoyenne et bénévole, qui existe depuis 1998, offre aide, conseils et services aux parents qui ont choisi cette option. « Notre mission est de démystifier l’éducation à la maison, auprès des familles, des écoles, du public et du ministère de l’Éducation », a expliqué Mme Dumond en entrevue.

Elle rapporte que les nouveaux membres ont évoqué plusieurs raisons pour avoir choisi d’enseigner à leurs rejetons cette année.

« Certains estiment que les mesures sanitaires mises en place par les écoles ne sont pas suffisantes pour protéger les enfants de la COVID-19 », alors que d’autres trouvent au contraire qu’il y a « trop de contraintes » cette année, dont le port du masque. Ils estiment que ce contexte n’est pas propice à l’apprentissage.

Mais aussi, des parents ont découvert la possibilité d’enseigner à la maison avec toutes les discussions qui ont eu lieu depuis la fermeture des écoles au printemps en raison de la pandémie, ajoute la présidente de l’AQED.

Pour l’organisation laïque et sans but lucratif, ce nombre de membres est un record.

Mais encore plus de pères et de mères pourraient bientôt faire le choix de l’école chez soi, croit Mme Dumond.

« Beaucoup de parents attendent d’avoir le jugement », a-t-elle dit, faisant référence au groupe de mères qui a déposé devant le tribunal une demande pour que les cours en ligne, offerts par le ministère de l’Éducation aux enfants exemptés par leur condition médicale, soient offerts à tous, peu importe leur état de santé.

Si le juge refuse de l’ordonner, d’autres parents pourraient bien transformer leur salon en salle de classe.