(Québec) Québec demeure inflexible : pas question d’offrir une compensation financière aux villes qui seront forcées de céder des terrains pour y construire des écoles.

Les arguments présentés par quelques porte-parole du monde municipal, au cours d’une rencontre d’environ une heure mercredi, n’ont pas convaincu le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, et la ministre des Affaires municipales, Andrée Laforest, de changer d’idée.

Le gouvernement et les municipalités se retrouvent donc dos à dos, dans une impasse causée par la loi 40.

Au bout du compte, ce sont les contribuables qui pourraient bien devoir payer la note, sur leur compte de taxes municipales.

Avec sa loi 40, le gouvernement permettra aux futurs centres de services scolaires d’acquérir des terrains municipaux sans débourser un sou. Les villes y voient un affront inacceptable, qui les privera éventuellement d’importantes sources de revenus.

Les maires ne cachent pas que le compte de taxes devra compenser ce manque à gagner.

Dans les plus grandes agglomérations « c’est en dizaines de millions (de dollars) que ça se compte », a calculé le maire de Gatineau et président du caucus des grandes villes de l’Union des municipalités du Québec (UMQ), Maxime Pedneaud-Jobin, en parlant du manque à gagner anticipé. À Montréal, il estime le trou financier éventuel à des centaines de millions.

« Ce n’est pas aux municipalités à assumer les responsabilités du gouvernement du Québec en matière d’éducation », a renchéri la présidente intérimaire de l’UMQ, Suzanne Roy, en mêlée de presse, au terme de la rencontre tenue au parlement, en fin de journée.

Conséquence inévitable : la loi 40, qualifiée de « vraiment radicale » par Mme Roy, aura « des impacts sur les comptes municipaux, c’est clair ».

Les ponts ne sont cependant pas coupés : une autre rencontre est prévue dans deux semaines.

La ministre Andrée Laforest, qui a qualifié la rencontre de « cordiale », a résumé ainsi la situation au terme de la rencontre : « Le fond reste le même ».

Le ministre Jean-François Roberge a dit que la rencontre avait au moins permis de clarifier le « changement de paradigme » inscrit dans la loi 40, dont le but premier était d’éliminer les élections scolaires et les commissions scolaires.

Plus tôt, en mêlée de presse, le premier ministre François Legault a cherché à se faire rassurant.

« J’anticipe aucune hausse de taxes municipales », a-t-il dit, faisant valoir que lorsqu’une nouvelle école apparaissait dans un quartier, cela entraînait de la construction domiciliaire, donc « il devrait peut-être même y avoir une baisse de taxes ».

Opposition

En matinée, l’opposition libérale avait sonné l’alerte, disant craindre que la loi 40 aurait précisément pour effet de faire gonfler le compte de taxes municipales.

La loi 40, adoptée sous bâillon dans la nuit de vendredi à samedi, stipule que le gouvernement donne au maximum deux ans aux futurs centres de services scolaires pour négocier avec les villes la cession de terrains convoités pour construire des écoles.

« Comment se fait-il que ce gouvernement-là n’a pas prévu ça ? », s’est interrogé le chef libéral Pierre Arcand, en mêlée de presse, se disant persuadé que « c’est le citoyen qui va payer » au bout du compte.

« Toujours plus d’arrogance, toujours moins de transparence », a résumé de son côté la porte-parole péquiste en éducation, la députée Véronique Hivon, qui reproche au gouvernement d’avoir procédé « en catimini » dans ce dossier, « à la sauvette », sans consultation, un grave accroc à la démocratie, selon elle.

La hausse de la taxe municipale est un enjeu bien réel, selon l’opposition péquiste, qui prédit que le lien de confiance entre le gouvernement et le monde municipal est rompu.

Jeudi, le sujet sera aussi à l’ordre du jour d’une réunion du caucus des grandes villes de l’UMQ, comptant plus de 100 000 habitants.

En vain, l’opposition libérale est revenue à la charge mercredi pour réclamer au gouvernement qu’il retire de la loi 40 les articles abordant la question de la cession de terrains municipaux.