La Commission scolaire de Montréal (CSDM) a reçu 32 400 $ d’une organisation privée représentant des fabricants de contenants jetables pour financer l’embauche d’un employé chargé de la « gestion écologique des déchets », a appris La Presse.

Le Conseil canadien des manufacturiers de contenants multicouches (CCMCM) obtient en retour l’accès aux données sur la récupération à la CSDM, stipule l’entente obtenue en invoquant la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

« C’est presque une étude de marché ! », s’exclame Violaine Cousineau, qui était jusqu’à tout récemment commissaire scolaire indépendante à la CSDM.

« Il y a des gens qui ont un intérêt financier derrière ça », affirme-t-elle.

Durant huit mois, la « Ressource » embauchée veillera à la « gestion écologique des matières résiduelles dans l’ensemble des 125 écoles primaires de la CSDM », précise l’entente conclue en octobre, qui vise notamment les berlingots de lait.

« La CSDM fera rapport au CCMCM » au milieu et à la fin du mandat de l’employé, en indiquant notamment le nombre d’écoles visitées, les mesures mises en place, le nombre d’écoles ayant reçu des bacs de récupération et du matériel pédagogique et le « taux de récupération estimatif » des berlingots.

« Les entreprises [qui fabriquent ces contenants] veulent faire croître leur récupération et leur recyclage, parce qu’on sait que c’est important pour les consommateurs », a déclaré à La Presse la directrice générale du CCMCM, Isabelle Faucher.

Les données recueillies, tout comme les autres que le CCMCM obtient par le truchement d’autres projets, permettront de « voir s’il y a des meilleures pratiques qui peuvent être répliquées », précise Mme Faucher.

La CSDM a refusé d’accorder une entrevue à La Presse sur le sujet, mais a indiqué dans un courriel que la personne embauchée « répond à [ses] besoins selon [sa] vision ».

« Cette nouvelle ressource permet de faire avancer notre Plan vert et aide à bonifier les bonnes pratiques en matière de recyclage dans les écoles », écrit le porte-parole de la CSDM, Alain Perron.

La CSDM n’a pas répondu aux questions concernant les coûts que cette entente engendre pour elle ni sur l’existence d’autres emplois financés par des entités privées.

La Presse avait révélé en juin dernier que la CSDM était en discussion pour conclure cette entente.

La Loi sur l’instruction publique permet aux commissions scolaires de recevoir des dons d’entreprises privées à condition qu’ils ne soient pas « incompatibles avec la mission de l’école », avait alors indiqué le ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur.

Remettre en question les berlingots

Violaine Cousineau estime que ce financement des fabricants de contenants détourne l’attention du véritable problème.

Il faudrait se questionner sur la pertinence de faire, en 2020, « une distribution massive de berlingots de lait » au lieu de simplement chercher à gérer « ces déchets-là », dit-elle.

Les écoles pourraient « minimalement utiliser des pintes de lait », afin de réduire la quantité de contenants, illustre-t-elle.

« Un contrat comme ça ne nous permet pas de nous questionner sur ce qu’on fait », affirme Mme Cousineau.

Une telle réflexion a-t-elle eu lieu ou est-elle prévue à la CSDM ?

« Non », a simplement répondu son porte-parole, Alain Perron.

Violaine Cousineau avance qu’à la lumière de la refonte du Guide alimentaire canadien, il faudrait aussi se demander si le lait est toujours l’aliment qu’il convient de distribuer aux enfants.

— Avec William Leclerc, La Presse