(Québec) Sur la défensive dans le dossier des maternelles 4 ans, le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, s’envole pour New York, où il compte s’inspirer de ce qui se fait dans trois écoles et au Département de l’Éducation.

Il répond à l’invitation de Carlyn Rahynes, de l’école Learning through Pre-K Center, lancée dans La Presse le 6 janvier. New York a été identifiée par le ministère comme un exemple de réussite ; elle a implanté la maternelle 4 ans pour tous et l’étendra même aux enfants de 3 ans.

M. Roberge prend le large après une dure semaine en étude des crédits, où il a été forcé d’admettre que le coût moyen d’aménagement de chaque classe de maternelle 4 ans serait de 800 000 $, et non de 122 400 $ comme établi pendant la campagne électorale. Le coût est donc six fois plus élevé que prévu.

La Coalition avenir Québec s’est engagée à offrir des maternelles 4 ans partout au Québec pour que tous les enfants en bénéficient. Mais sept mois après son arrivée au pouvoir, elle peine toujours à justifier son projet dont beaucoup estiment qu’il nuira aux garderies et CPE existants.

Faire mieux

Loin d’accepter un moratoire, comme l’a suggéré Québec solidaire (« Il n’en est absolument pas question »), M. Roberge persiste en allant chercher à New York des informations concernant les deux sujets qui l’intéressent le plus, de son propre aveu, soit la formation des maîtres et le type de programme offert aux enfants de 4 ans.

Il se défend de faire de la cueillette d’informations sur le tard, presque trois mois après le dépôt de son projet de loi sur les maternelles 4 ans. « Il y a suffisamment d’études, de données probantes, d’experts qui vont dans la direction d’une maternelle 4 ans pour qu’on puisse y aller. Cependant, on est toujours à l’affût de faire mieux, de l’implanter mieux, d’avoir une meilleure formation », a-t-il déclaré en entrevue téléphonique, dimanche, quelques heures avant son départ.

Il rencontrera au cours de sa tournée-éclair des enseignants et des dirigeants du Département de l’Éducation de la mairie de New York, dont Xanthe Jory, responsable des politiques et des programmes, et Lucas Koehler, qui s’occupe des finances et des opérations, ainsi que Sherry Cleary, qui veille au développement professionnel des enseignants au New York Early Childhood Professional Development Institute.

« Quand on y va avec les programmes, les finances et le développement professionnel, je pense qu’on fait vraiment le tour du jardin », a expliqué M. Roberge, en ajoutant voir plusieurs similitudes entre le Québec et la Grosse Pomme.

Similitudes

La Ville de New York, qui compte 8 millions d’habitants, gère son propre ministère de l’Éducation. Mais le maire Bill de Blasio a le plein contrôle des écoles publiques de sa ville, contrairement au Québec, qui doit composer avec des commissions scolaires qui se disent incapables d’ouvrir de nouvelles classes ou de trouver des enseignants.

« Un programme qui peut être comparé, une population qui peut être comparée, ils sont au moment de l’implantation, je trouvais ça intéressant de voir sur quelles bases ils s’appuyaient, comment ils allaient le faire, la formation des gens qui allaient agir auprès des enfants. C’est une belle opportunité de collaborer », a renchéri le ministre.

Surtout, il aime que les autorités new-yorkaises se soucient de l’intervention précoce pour assurer l’égalité des chances.

« Nous, on veut baser notre nouveau programme selon ce qu’on appelle l’approche mixte, qui mise à la fois sur le développement global des enfants, l’apprentissage par le jeu, la socialisation, mais aussi sur une stimulation précoce avec un peu de littéracie et de numéracie. J’ai hâte de voir si eux vont davantage sur une approche qui est tout un, tout l’autre, ou qui est davantage équilibrée comme la nôtre, et pourquoi. »

Autre particularité de New York : elle a intégré les maternelles 4 ans du secteur public à celles du secteur à but non lucratif, donc à une infrastructure existante. Le Québec pourrait-il offrir la maternelle 4 ans dans les garderies et CPE ? « L’infrastructure n’est pas là, les CPE sont pleins », tranche-t-il.

D’autres échanges à prévoir

Jean-François Roberge n’en démord pas ; la maternelle 4 ans est utile, car elle s’ajoute aux garderies et CPE. « Ce n’est pas en opposition à ce qui se fait là. C’est une offre qui est différente. […] Les parents sont derrière l’implantation, on le voit. »

Il balaie du revers de la main les accusations des partis d’opposition, qui crient à l’improvisation dans ce dossier. D’après lui, elles ont fait leur nid et ne font que s’opposer, en sachant qu’elles « peuvent compter sur un réseau de groupes de pression qui les appuient ».

La « quête d’informations » du ministre Roberge ne s’arrêtera pas là. Il prévoit consulter d’autres experts dans les prochains mois, possiblement ceux de la Scandinavie, de l’Europe, du nord-est des États-Unis et du reste du Canada.

Y aura-t-il d’autres déplacements ? « Il ne faut se priver d’aucune ressource, d’aucune expertise quand on procède à l’implantation d’un programme ambitieux et important comme ça, a-t-il dit. Il faut s’inspirer de plusieurs bons modèles pour trouver le nôtre. »

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Horaire du ministre Roberge à New York

Lundi 6 mai :

— visite d’une classe de maternelle 4 ans à l’école The Lillian Weber School for the Arts

— rencontre avec le Département de l’Éducation de la mairie de New York

— visite de l’école Battery Park City School

— visite du New York Early Childhood Professional Development Institute

Mardi 7 mai :

— visite de l’école Learning through Pre-K Center

— rencontre avec Carlyn Rahynes, directrice des classes maternelle 3 ans et 4 ans