Il existe un climat « malsain » au département d'études anglaises de l'Université Concordia, a signalé une commission indépendante mandatée pour enquêter sur des plaintes d'inconduite sexuelle.

Selon le rapport publié jeudi par une juge de la Cour d'appel du Québec, Pierrette Rayle, à la retraite et deux psychologues, Alain Reid et François Rabbat, il existe des actes de violence sexuelle « réels ou perçus » commis par des membres du corps professoral.

Les auteurs du rapport ont donné une définition large de la violence à caractère sexuel, allant des avances non désirées jusqu'à l'agression sexuelle.

Le département d'anglais de l'université montréalaise a été placé en observation en janvier 2018 quand des allégations d'inconduite sexuelle d'enseignants contre des étudiantes ont fait surface.

Le rapport publié jeudi se fonde sur une enquête réalisée d'avril à septembre 2018. Un total de 109 personnes - étudiant-es, professeur-es, employé-es et diplômé-es - ont répondu aux questions des enquêteurs. Ceux-ci ont découvert des preuves de favoritisme et de conflit d'intérêts. Ils ont conclu que les relations amoureuses ou sexuelles entre des professeur-es et des étudiant-es n'avaient pas leur place dans une université.

« Le risque d'abus ou de malentendu gravement préjudiciable est beaucoup trop important », notent les auteurs du rapport.

Toutefois, ils conviennent que l'université est limitée dans ce qu'elle peut faire puisque le législateur a choisi de ne pas interdire les relations romantiques ou sexuelles consensuelles entre professeur-es et étudiant-es dans la Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d'enseignement supérieur.

Parmi les recommandations du comité figure l'interdiction par l'université de tenir des cours dans les bars. Selon les auteurs du rapport, les cours qui se déroulent dans un bar fournissent des occasions qui peuvent mener à l'inconduite sexuelle.

« Des étudiant-es ont déclaré que ces situations ont parfois mené à des inconduites sexuelles, à une fraternisation inappropriée ou ont brouillé les frontières entre relations professionnelles et personnelles, peut-on lire dans le rapport. De nombreux problèmes inacceptables peuvent survenir lors de telles activités. »

Des étudiantes ont rapporté avoir fait l'objet d'une tentative de séduction non désiré par des professeurs. « Or, ces étudiant-es, craignant des conséquences potentielles sur leurs notes ou leur carrière, peuvent ressentir l'obligation de répondre positivement à des avances non désirées », affirment les auteurs.

Le recteur de l'Université, Alan Sheppard, a reconnu que le rapport trace un portrait inquiétant. « Nous avons à coeur le bien-être de la communauté de Concordia et il nous est pénible d'être informés de problèmes - réels ou perçus - tels que la violence à caractère sexuel, le favoritisme, la discrimination et la méfiance à l'égard de notre établissement en ce qui a trait au traitement des plaintes », écrit-il dans une lettre publiée sur le site internet de Concordia.

Il fait observer que « seul un petit nombre » de membres du corps professoral semblent s'être comportés de manière inappropriée. Il relève aussi que de nombreux intervenants dans l'enquête ont parlé « en termes élogieux de leur expérience au Département d'études anglaises ».

Les auteurs du rapport ont déploré que seulement 109 personnes sur une possibilité de 3228 aient participé à l'enquête. « Il est donc difficile pour les auteur-es du présent rapport d'étendre la portée de leurs observations aux personnes qui n'y ont pas pris part », ont-ils souligné.