Des campements ont été érigés devant quatre écoles anglophones, ce week-end, par des parents qui ont bravé un froid polaire dans l'espoir d'obtenir une place en maternelle pour leurs enfants. Les établissements prisés ont comme point en commun d'offrir un programme d'immersion française.

La période d'inscription dans les écoles primaires de la commission scolaire English-Montréal débute ce matin.

À l'école Royal Vale, dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce, et à l'école Edinburgh, dans le secteur Montréal-Ouest, des dizaines de parents ont cependant commencé à faire la file dès vendredi après-midi. Certains ont dormi dans des tentes, d'autres dans leur auto. Le lendemain, le scénario s'est répété à l'école Merton, à Côte-Saint-Luc, et à l'école Gardenview, dans l'arrondissement de Saint-Laurent.

«Nous sommes assez compétitifs pour faire le pied de grue afin de donner toutes les chances à nos enfants, mais que se passe-t-il pour ceux qui n'ont pas la possibilité de le faire ? C'est un système où l'accès est inégal», a déploré Leith Hamilton, un grand-papa qui est venu relever sa fille après deux nuits devant l'école Royal Vale, qui jouit d'une excellente réputation, notamment en raison de son programme de sciences et d'un riche calendrier d'activités parascolaires. «Mais l'enjeu, c'est le français, précise-t-il. Les anglophones veulent apprendre un français de qualité, mais ce n'est pas à leur portée dans toutes les écoles.»

Injuste?

La commission scolaire English-Montréal se défend de tolérer un système discriminatoire envers les parents qui n'ont pas les ressources ou la possibilité de faire la file en plein hiver pour être admis dans les meilleures écoles ou, du moins, dans celles qui offrent le programme d'immersion française.

«C'est le choix des parents, pas celui de la commission scolaire. Nous n'avons pas dit aux parents de faire la file, nous avons dit que les inscriptions étaient le lundi matin», affirme Michael J. Cohen, porte-parole de la commission scolaire English-Montréal.

Ce sont les conseils d'établissement de chaque école, dit-il, qui décident si les inscriptions dans les écoles contingentées se font à travers un système de loterie ou selon le principe du premier arrivé, premier servi.

M. Cohen raconte par ailleurs que les parents font la file devant l'école Royal Vale à partir du dimanche depuis près de 30 ans, mais il admet que c'est la première fois que les gens se mobilisent dès le vendredi. Par ailleurs, c'est la première fois que le phénomène surviendrait aux écoles Gardenview et Merton.

Malgré l'ambiance décontractée, les parents rassemblés autour du feu de camp érigé devant l'école Royal Vale ont fait état d'une véritable frustration par rapport aux écoles qui débordent à Montréal et des démarches qu'ils doivent entreprendre pour obtenir une place dans leur école de quartier. L'école Edinburgh, par exemple, qui fonctionne déjà à 25% au-delà de sa capacité, a seulement affiché 17 places pour l'an prochain (les enfants des fratries de l'école ont déjà été acceptés).

«Partout à Montréal, des enfants sont relégués dans des classes mobiles. J'essaie d'imaginer mon enfant entrer dans une roulotte pour être éduqué et je suis incapable de voir cette image. Ça m'amène beaucoup d'inconfort», a expliqué Natalia, qui a commencé à faire la file vendredi afin d'obtenir l'une des 40 places disponibles à l'école Royal Vale. «Je serais même prête à me sacrifier pour envoyer mon enfant au privé, tellement ça me semble incorrect.»

Selon la commission scolaire English-Montréal, un projet d'agrandissement d'école est à l'étude dans l'ouest de l'île. À la lumière des événements du week-end, il y aura «peut-être une réunion» pour faire un bilan, a indiqué Michael J. Cohen.