(QUÉBEC) Le gouvernement Legault justifiait le déploiement de la maternelle 4 ans en disant qu’il y avait « urgence » de rejoindre les enfants qui n’ont accès à aucun service de garde. Or, 70 % des enfants de cet âge inscrits à l’école en ce moment fréquentaient auparavant des services de garde reconnus, surtout des centres de la petite enfance (CPE), selon un coup de sonde réalisé auprès d’une trentaine de commissions scolaires.

Pour le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, ce tableau n’est ni « noir » ni une « mauvaise nouvelle ». « Oui, la maternelle 4 ans est une façon de rejoindre les gens qui n’envoient pas leurs enfants dans un service de garde reconnu, mais c’est aussi et surtout un service qu’on veut offrir de manière universelle, à tout le monde », a-t-il affirmé en entrevue hier.

Le sondage, que La Presse a obtenu, a été réalisé par la Fédération des commissions scolaires du Québec (FCSQ). La moitié des commissions scolaires francophones – 31 sur 60 – y ont participé. Parmi elles, il y a les commissions scolaires de Montréal, de la Pointe-de-l’Île, de la Seigneurie-des-Mille-Îles, de Saint-Hyacinthe et de la Capitale.

Le 20 août dernier, le ministre Roberge chiffrait à près de 7000 le nombre d’enfants inscrits à la maternelle 4 ans cette année. Les 31 commissions scolaires concernées en comptent environ 3000.

Provenance des élèves

M. Roberge reconnaissait alors que son ministère ignorait la provenance des presque 7000 élèves inscrits : proviennent-ils du réseau de services de garde ? Sont-ils des enfants qui n’avaient accès à aucun service auparavant ? Le gouvernement Legault a justifié à maintes reprises le plan de déploiement de la maternelle 4 ans en disant qu’il voulait rejoindre ces enfants. « Il y a une urgence, 20 000 enfants de 4 ans n’ont aucun service en ce moment, ni en CPE, ni en milieu familial, ni en milieu privé subventionné, privé non subventionné, ni en maternelle 4 ans », affirmait Jean-François Roberge en mai dernier.

Selon le sondage réalisé par la FCSQ, 70 % des enfants proviennent du réseau des services de garde. La Fédération a demandé à ses membres d’indiquer, « au meilleur de [leur] connaissance, le nombre d’élèves pour chaque provenance ». Voici les résultats :

– CPE : 44,1 % (1259 enfants)
– Service de garde en milieu familial : 12,6 % (361 enfants)
– Garderies privées subventionnées : 7,4 % (211 enfants)
– Garderies privées non subventionnées : 6 % (173 enfants)

Les commissions scolaires ont répondu qu’un peu plus de 8 % des élèves (246 enfants) proviennent « d’autres services que ceux régis ». On peut penser aux petites garderies privées en milieu familial qui n’ont pas de permis du gouvernement du Québec.

Il reste 613 enfants (21,4 %) qui ne proviennent d’aucun service de garde. Les commissions scolaires ont répondu dans ce cas « autres provenances ».

Notons que sur les 31 commissions scolaires répondantes, 18 ont indiqué la provenance de l’ensemble de leurs élèves de maternelle 4 ans. Et 13 n’ont inscrit aucune provenance pour une partie de leurs élèves (459).

En entrevue, le ministre Roberge a fait valoir qu’une part des enfants de 4 ans aujourd’hui à la maternelle n’étaient pas dans les garderies auparavant, ce qui leur permet de bénéficier d’un service auquel ils n’avaient pas accès auparavant. Pour le reste, à partir du moment où le gouvernement s’attend à ce que la moitié des enfants de cet âge fréquentent la maternelle, « c’est bien sûr qu’il y a des enfants qui vont arriver des services de garde ». Il a invité à la prudence quant à l’interprétation de données qui touchent une partie seulement des commissions scolaires. Il a demandé à son ministère de lui offrir un portrait complet. De son côté, le ministre de la Famille, Mathieu Lacombe, a souligné que les places libérées par ceux qui s’en vont à la maternelle pourront être offertes à d’autres qui sont sur une liste d’attente, comme le disait la Coalition avenir Québec en campagne électorale.