Parce que leur école secondaire du quartier Notre-Dame-de-Grâce déborde, des dizaines d’élèves montréalais ont appris à la dernière minute qu’ils devraient aller ailleurs. Résultat : plusieurs ont dû patienter à la maison pendant presque deux semaines après la rentrée pour savoir quelle école ils fréquenteraient, d’autres se sont tournés vers le privé ou le réseau anglophone.

Jon Davy croyait que c’était une formalité : ses fils, qui fréquentaient l’an dernier des établissements privés, allaient intégrer à la rentrée leur école secondaire de quartier, l’école Saint-Luc, où ils avaient été inscrits en juin.

Or, à une semaine de la rentrée scolaire, il a appris que l’école Saint-Luc était pleine. « On nous a dit : “Même si tu restes dans le quartier, il n’y a pas de place” », relate Jon Davy.

Malgré les démarches du père, les jours passaient et aucune solution ne pointait à l’horizon. Quelle école fréquenteraient ses fils ?

Mardi – dix jours après la rentrée –, il a reçu comme d’autres parents dans sa situation une lettre de l’école secondaire Honoré-Mercier dont La Presse a obtenu copie. On leur enjoignait de se rendre à l’école du quartier Ville-Émard le lendemain pour y inscrire leurs enfants.

« La ponctualité est importante puisque si vous arrivez après 8 h 30, vous devrez prendre rendez-vous une autre journée », y lit-on.

« Nous comprenons que le lieu peut être loin, mais votre enfant est dans l’obligation de fréquenter l’école et Honoré-Mercier est la seule école où il y a encore des places disponibles. »

On précise également l’adresse de la boutique où l’uniforme scolaire obligatoire peut être acheté.

Avant la réception de cette lettre, les fils de Jon Davy patientaient à la maison.

S’ils le savaient au mois de juin qu’ils étaient complets, on aurait préféré l’apprendre plutôt que le savoir à la rentrée.

Jon Davy

M. Davy ajoute qu’il se serait mis à la recherche de solutions plus tôt, s’il avait été informé de la situation.

Une quarantaine d’élèves qui étaient inscrits à l’école secondaire Saint-Luc ont dû changer d’établissement, confirme la CSDM.

« La situation est complexe dans le secteur Notre-Dame-de-Grâce, car il y a aussi surpopulation dans les écoles secondaires », a déclaré par courriel Alain Perron, porte-parole de la CSDM.

Moins de 24 heures d’avis

La Presse a parlé à plusieurs parents qui ont vécu des rentrées difficiles. Véronique Belval a deux enfants qui fréquentent cette école secondaire depuis plusieurs années. Elle dit avoir appris à moins de 24 heures d’avis qu’une de ses filles avait été transférée à l’une des deux annexes de l’école, un bâtiment qui vise justement à régler les problèmes de surpeuplement.

« Ça fait quatre ans qu’elle est à cette école », dit la mère, qui déplore que ses appels pour avoir des explications soient restés sans réponse. Parce que son conjoint a fréquenté une école anglophone, et devant le silence de la commission scolaire, elle a décidé d’inscrire ses filles dans une école du réseau anglais, où elles fréquentent déjà une école de leur quartier.

Alejandra Peña a appris le 19 août que l’inscription de sa fille en troisième secondaire ne tenait plus. À une semaine de la rentrée, elle s'est tournée vers une école privée, une dépense imprévue au budget familial. « Je n’avais aucun renseignement. Si j’avais attendu, ma fille serait rentrée à l’école avec deux semaines de retard. Ça dépasse l’entendement », dit-elle.

Véronique Lauzon a quant à elle inscrit son fils à l’école secondaire Saint-Luc à la mi-février. Elle a appris le 27 août, « parce que j’ai posé la question », qu’il était sur la liste d’attente.

Ce n’est que quatre jours après la rentrée scolaire qu’il a eu une place à l’école secondaire Saint-Luc. Qu’en est-il des 180 jours obligatoires de fréquentation scolaire ? demande la mère.

Sans commenter ce cas précis, le ministère de l’Éducation nous a répondu que « la Loi sur l’instruction publique prévoit que la commission scolaire a le devoir de s’assurer que toute personne ayant droit au service de l’éducation préscolaire et aux services d’enseignement primaire et secondaire reçoit les services éducatifs auxquels elle a droit ».

Tous les élèves de l’école secondaire Saint-Luc ont maintenant une place dans une école, dit la CSDM. Sur Facebook, la commissaire scolaire du secteur, Marie-José Mastromonaco, a reconnu en réponse à des parents mécontents que « le processus pour informer les parents [devait] être revu ».

L’école secondaire Saint-Luc est « l’une des écoles les plus multiculturelles du Québec, où 2000 jeunes provenant de 102 pays et parlant 64 langues se côtoient », lit-on sur le site de la CSDM. À la dernière année scolaire, elle était remplie à 97 % de sa capacité.

« Ce que ça montre, c’est l’incroyable manque d’espace dans Côte-des-Neiges et Notre-Dame-de-Grâce. On dit sur toutes les tribunes qu’on veut faire une école de proximité, et là, on oblige les jeunes à prendre le métro. Il y a une urgence à faire de la construction », dit Violaine Cousineau, commissaire indépendante à la CSDM.