L'écart entre les résultats des filles et ceux des garçons en mathématiques est moins grand dans les pays où il y a moins d'inégalités sociales, selon une nouvelle étude française. Cela pourrait mettre un terme au débat sur la cause de cet écart.

INÉGALITÉS

Les études sur les moins bons résultats des filles en math affichent des résultats divergents, selon Thomas Breda, de l'École d'économie de Paris, qui est l'auteur principal de l'étude publiée en mars dans la revue Science. « Nous avons décidé d'envisager le problème sous un autre angle : l'idée que les inégalités dans une société aient une influence les unes sur les autres. Quand on essaie de voir si les sociétés plus sexistes ont des différences plus grandes entre filles et garçons au niveau des résultats en mathématiques à l'école primaire et secondaire, c'est un peu une tautologie : on vérifie si les sociétés plus inégales entre les sexes le sont aussi à l'école. Alors, nous avons considéré toutes les inégalités. Et le résultat est clair. Par exemple, dans les sociétés où il y a moins de différences entre les écoles des quartiers pauvres et riches, il y a moins d'écart entre les filles et les garçons au niveau des maths, mais aussi moins d'écart entre les résultats des enfants de la majorité et des minorités ethniques. »

GARÇONS

Les filles ont généralement des résultats moins hauts en maths que les garçons, mais elles sont en avance en lecture. Dans les sociétés moins inégales, leur retard en maths s'amenuise, mais celui des garçons en lecture est encore plus grand. « Quand il y a moins d'inégalités, c'est toujours favorable aux filles, dit M. Breda. Ça ne bénéficie jamais aux garçons pour ce qui est des maths, des sciences et de la lecture. On se rend compte qu'à l'école, du moins en France, les garçons sont de plus en plus faibles. Il y a toujours de très bons garçons, mais il y en a beaucoup qui sont très mauvais élèves. » Quelle peut être la cause de cette masculinisation des cancres ? « On a regardé si le haut taux de femmes parmi les professeurs du primaire, 85 % en France, pouvait jouer, dit M. Breda. Les travaux sur le biais de notation, l'idée que les femmes donnent de moins bonnes notes aux garçons, ne font rien ressortir. On envisage maintenant l'idée qu'avoir un enseignant du même sexe pousse les élèves à vouloir continuer à étudier. »

EN CHIFFRES

17 %

Proportion des hommes québécois âgés de 25 à 34 ans ayant un diplôme de baccalauréat universitaire en 2015

27 %

Proportion des femmes québécoises âgées de 25 à 34 ans ayant un diplôme de baccalauréat universitaire en 2015

15 %

Proportion des hommes québécois âgés de 25 à 34 ans ayant un diplôme de baccalauréat universitaire en 2008

24 %

Proportion des femmes québécoises âgées de 25 à 34 ans ayant un diplôme de baccalauréat universitaire en 2008

Source : Institut de la statistique du Québec

0,01 %

En 2009, une étude sur les tests préuniversitaires américains SAT avait conclu que chez les génies en mathématiques - le 0,01 % qui obtient les meilleures notes - , les garçons sont de 3,5 à 4 fois plus nombreux que les filles et que cette proportion restait stable depuis le début des années 90. Cette étude controversée est-elle infirmée par les résultats de M. Breda, qui portent sur un groupe plus large, représentant 10 % des meilleures notes ? « Nous avons fait l'analyse sur les gens qui ont obtenu un niveau 5 ou 6 en mathématiques aux examens internationaux PISA, dit-il. En la reprenant pour les niveaux 4, 5 et 6, ce qui représente les 25 % meilleurs résultats, la relation entre les inégalités et l'écart entre filles et garçons reste la même. Et si on prend seulement le niveau 6 de PISA, ce qui représente les 2,3 % meilleurs résultats, on n'a pas assez de puissance statistique, mais les tendances sont les mêmes. Alors, je pense qu'on peut exclure qu'il y a davantage de garçons parmi les génies en mathématiques. De toute façon, au niveau de la nature, il n'y a pas de raison pour qu'il en soit ainsi. »

« DESSINE UN SCIENTIFIQUE »

Une autre étude, publiée en mars dans la revue Child Development, a analysé des dessins de 20 000 enfants faits depuis 50 ans dans le cadre d'un programme américain appelé « Dessine un scientifique » visant à intéresser les filles aux sciences. Les psychologues de l'Université Northwestern ont observé que, dans les années 60 et 70, seulement 1 % des dessins représentaient des femmes, alors que la proportion est maintenant de 28 %. Ils ont aussi relevé que, parmi les enfants âgés de moins de 8 ans, la proportion de femmes dans les dessins de scientifiques est de 50 %.