Les membres de la Fédération des cégeps ont beau être réunis en congrès sous le thème «50 ans d'évolution», c'est plutôt l'immobilisme et les coupes budgétaires répétées que deux anciens directeurs de cette fédération ont dénoncés, hier.

«Une impossibilité de réfléchir à demain.» Pour Gaëtan Boucher, qui a été président-directeur général de la Fédération des cégeps entre 1985 et 2010, c'est l'effet qu'ont eu les compressions successives sur le réseau collégial.

«Le gouvernement a décidé de réinvestir, mais la difficulté, c'est l'incertitude. Comment penser le futur? On n'a pas de droits de scolarité, le financement fédéral est presque inexistant. Nos fondations ne sont pas significatives par rapport à celles des universités. Quand le gouvernement opère des compressions, ça fait véritablement mal», dit Gaëtan Boucher.

Le dirigeant de cette même Fédération de 2010 et 2015 fait un constat semblable. «Je n'étais plus capable d'entendre les ministres me dire : coupez dans la gestion, dans l'administratif, dit aujourd'hui Jean Beauchesne. Comme si ça ne servait pas au soutien à nos enseignants. Il y a eu des coupures draconiennes, ce n'est pas vrai que ça n'a pas affecté les services.»

«Je ne fais pas de politique en disant ça, poursuit-il. Tant le Parti québécois que le Parti libéral ont joué dans ce film, ils ont écrit ce scénario-là.»

L'actuel président-directeur général de la Fédération des cégeps estime lui aussi que les coupes ont eu des «effets dramatiques» sur les collèges de la province. «Je pense qu'on est passé très, très proche d'un éclatement du réseau, dit Bernard Tremblay. On nous a enlevé une capacité de développement. Notre ministère a été beaucoup affaibli, il faut qu'il soit fort pour accompagner son réseau, face aux autres ministères qui sont assez présents.»

Un appel à plus de flexibilité

Puisque plus de 60% des cégépiens concilient aujourd'hui travail et études, les collèges doivent s'adapter, notent par ailleurs les anciens présidents-directeurs de la Fédération.

«Les étudiants travaillent 20 heures par semaine. C'est beaucoup pour un étudiant à temps plein, dit Jean Beauchesne. Il faut que les cégeps soient aussi animés le soir que le jour pour permettre une formation plus éclatée que la formule traditionnelle.»

Il appelle à rouvrir les conventions collectives des enseignants pour pouvoir donner des prestations de service le soir ou la fin de semaine, par exemple.

Gaëtan Boucher croit non seulement qu'il faut adapter les conventions collectives et les cégeps à la réalité des élèves, mais il appelle également à discuter de la formation générale, sans pour autant remettre en doute son existence même.

«Il faut trouver moyen d'en parler, de débattre du contenu de la formation générale et de la manière dont nous enseignons dans nos établissements d'enseignement. Y'a pas un ministre qui veut aborder ça. Pourtant, le monde change, nos étudiants changent! On peut-tu juste se poser quelques questions? Est-ce que les cours que nous donnons, ce sont les bons, ou pas? Toutes les fois où on a voulu en débattre, on a remis le couvercle sur la marmite.»