Québec est en voie de révoquer le permis de la garderie subventionnée Les Trésors de Nemo, dont l'une des copropriétaires a été arrêtée pour voies de fait sur trois enfants et s'est fait ordonner de ne plus y mettre les pieds. La nature des gestes reprochés l'empêche d'exploiter un service de garde, tranche finalement le ministère de la Famille.

Il lui enverra aujourd'hui, par huissier, un « avis préalable » à la révocation, passage obligé pour sortir un exploitant du réseau.

«Je vous avise que le ministre de la Famille a l'intention de révoquer le permis», peut-on lire dans le document officiel obtenu par La Presse hier. La copropriétaire peut, dans un délai de 10 jours, «présenter [ses] observations par écrit» et «produire des documents avant qu'une décision ne soit rendue».

La lettre de trois pages fait un bref retour sur les événements dont La Presse a fait état en grande partie samedi dernier. Le Ministère a été informé le 28 mars d'un signalement fait à la Direction de la protection de la jeunesse «concernant un comportement inadéquat» de la part de la copropriétaire de la garderie de Blainville. Il s'agit d'«abus physiques» envers des enfants, selon plusieurs sources qui ont témoigné à La Presse sous le couvert de l'anonymat. Par exemple, elle aurait empoigné un enfant par la tête et plaqué son visage au sol.

Arrêtée pour voies de fait

Le 28 avril, après une enquête du Service de police de Blainville, la dame a été arrêtée pour voies de fait sur trois enfants. Elle a été relâchée sous promesse de comparaître le 25 juillet. Cette comparution a été reportée, car le Directeur des poursuites criminelles et pénales n'aurait pas terminé l'étude du dossier. La copropriétaire s'est fait imposer de ne plus se présenter à sa garderie.

Le 26 mai, le Ministère lui a demandé de fournir une nouvelle déclaration d'«absence d'empêchements», un document produit par les forces policières attestant qu'un responsable de service de garde n'a pas un comportement susceptible de compromettre la sécurité des enfants. Or, cette nouvelle déclaration, reçue le 11 juillet, révélait «la présence d'empêchements» en raison de «la nature des gestes présumés» de la part de la copropriétaire, écrit le Ministère.

Il appuie sa décision sur deux articles de la Loi sur les services de garde. L'article 26 prévoit que «le ministre peut refuser de délivrer un permis si le demandeur a ou a déjà eu un comportement pouvant raisonnablement faire craindre pour la sécurité physique ou morale des enfants». Et selon l'article 28, «le ministre peut suspendre, révoquer ou refuser de renouveler le permis du titulaire qui [...] cesse de remplir les conditions de délivrance du permis», «ne peut établir l'absence de tout empêchement» et «s'adonne à des pratiques ou tolère une situation susceptible de compromettre la santé, la sécurité et le bien-être des enfants à qui il fournit des services de garde ».

Des parents scandalisés



Des parents disaient à La Presse être scandalisés que la copropriétaire puisse continuer d'exploiter la garderie de 70 places. Ils reprochaient au Ministère de tergiverser et de démontrer «le caractère limité de son pouvoir d'intervention». Le ministre de la Famille, Sébastien Proulx, avait réagi en disant que des «mesures administratives» étaient à l'étude.

Depuis la diffusion de notre reportage, des parents font signer une pétition pour demander au Ministère «d'imposer une tutelle à la garderie Les Trésors de Nemo et de la convertir en centre de la petite enfance». Ils disent que la directrice et les éducatrices de la garderie ont toujours leur confiance.

Vendredi dernier, le Ministère disait avoir l'intention de maintenir les services à cet établissement. Il n'a pas été possible de savoir si ce sera bel et bien le cas à la suite de la révocation du permis.