Les étudiants au doctorat en psychologie, qui boycottent leur internat et leurs stages depuis cinq semaines, ont manifesté jeudi à Montréal et Québec pour réclamer une rémunération au même titre que les autres professionnels de la santé lors de leur internat.

Depuis 2006, le titre professionnel de psychologue n'est plus accessible aux détenteurs de maîtrise et exige désormais un doctorat, ce qui implique une année d'internat en milieu hospitalier au terme de leur scolarité.

Or, contrairement aux futurs médecins, pharmaciens et infirmières spécialisées, ces étudiants ne reçoivent aucune rémunération lors de leur internat, bien que le travail de chaque psychologue interne représente l'équivalent de 80 pour cent d'un poste à temps plein durant son année d'internat.

Quelque 250 étudiants font leur internat chaque année, ce qui représente l'équivalent de 200 postes à temps plein pour lesquels Québec ne verse pas un sou.

Fait à noter, l'exigence du doctorat visait à ajuster la situation du Québec à celle du reste de l'Amérique du Nord. Cependant, le Québec est le seul territoire en Amérique du Nord où l'internat en psychologie n'est pas rémunéré. Au Canada, la rémunération moyenne est de 31 000 $ par année.

Québec n'a pas fermé la porte à la rémunération des futurs psychologues et a d'ailleurs demandé à l'ancien président de l'Ordre des psychologues du Québec, Luc Granger, de se pencher sur la demande. Son rapport est attendu prochainement.

«Le ministre de la Santé (Gaétan Barrette) ne s'est pas dit fermé à nos revendications», a reconnu le président de la Fédération interuniversitaire des doctorants en psychologie (FIDEP), Eddy Larouche, en entrevue avec La Presse canadienne.

«Il attend le rapport qui doit être déposé la semaine prochaine et il y aura ensuite des discussions qui seront entreprises pour voir comment mettre ça en place», a-t-il ajouté.

La Fédération n'a pas chiffré sa demande, mais elle estime que la rémunération de ses membres devrait se situer quelque part entre la moyenne canadienne et celle des médecins résidents québécois, qui s'établit autour de 45 000 $, de sorte que l'enveloppe réclamée se trouve dans une fourchette entre 7,75 millions et 11,25 millions.

Inaction libérale

La Fédération reproche au gouvernement libéral son inaction et son désintérêt et accuse le premier ministre Philippe Couillard de ne se préoccuper que de santé physique au détriment de la santé mentale.

Elle fait valoir la réaction du premier ministre au rapport de la protectrice du citoyen, lui qui a qualifié de «vent» les conclusions voulant que ce soient les personnes les plus vulnérables, notamment celles souffrant de problèmes de santé mentale, qui aient le plus souffert des compressions budgétaires de son gouvernement.

«Le ministre de la Santé travaille dans un contexte où ce qu'on lui demande, c'est de couper, couper, couper. Dans ce contexte-là, il a peut-être moins intérêt à répondre à de nouvelles revendications qui vont coûter des sous», note Eddy Larouche.

Les doctorants ont reçu l'appui de l'opposition péquiste, du Comité pour la protection des malades, de l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux, de l'Association des psychologues du Québec et de l'Union étudiante du Québec.

Leur manifestation coïncidait avec la séance, jeudi, de la Commission de la santé et des services sociaux à qui ils demandaient d'étudier une pétition de près de 20 000 noms réclamant que le gouvernement rémunère l'internat.

Les députés libéraux, majoritaires, ont toutefois refusé d'étudier cette pétition.

La Fédération promet que le boycottage, qui allonge les listes d'attente dans les hôpitaux, va perdurer «aussi longtemps que l'entêtement du gouvernement libéral».

«Les internes et les stagiaires, chaque année, voient environ 12 000 patients. Ce sont donc 12 000 personnes qui ne recevraient pas de services si jamais le boycottage s'appliquait sur une année complète», a fait valoir M. Larouche.

Un prolongement de ce boycottage pourrait aussi poser à terme un sérieux problème d'engorgement dans les hôpitaux, qui ne seraient pas en mesure d'accueillir la prochaine cohorte de finissants au doctorat pour l'année 2017-2018.