Certaines écoles concluent des partenariats avec des photographes ou des librairies qui vendent leurs produits aux parents en échange d'une ristourne qui est ensuite réinvestie dans les services aux élèves. Ce système est a priori légal, mais il est parfois inconnu chez les parents.

Ce sont les conseils d'établissements dans les écoles qui sont responsables de conclure ces ententes avec les photographes. Selon Corinne Payne, présidente de la Fédération des comités de parents du Québec (FCPQ), les membres du conseil font leur choix tous les trois à quatre ans et plusieurs critères sont considérés - donc pas seulement le montant de la ristourne.

D'ailleurs plusieurs procès-verbaux de conseils d'établissements consultés par La Presse canadienne ont fait le suivi des photos scolaires et les plaintes sont prises en considération s'il y a des problèmes sur le plan de la qualité.

Ni la Fédération des comités de parents du Québec ni la Fédération des commissions scolaires ne tiennent de chiffres sur le nombre d'écoles utilisant ce système au Québec ou sur une moyenne des sommes reçues en ristournes.

Selon un échantillon d'une dizaine d'écoles, le montant de la ristourne s'élève à quelques centaines de dollars, mais parfois il monte à plus de 1000 $ - cela dépend de la grosseur de l'école.

Par exemple, en 2015, une école de Granby affichait une ristourne de 201,95 $, tandis qu'une autre à Varennes avait reçu 626,22 $. La même année, une école de Saint-Constant avait fait état d'une somme de 1170,84 $.

«C'est une façon de recueillir des surplus tout en offrant un service. (...) Ce n'est pas énorme comme montant», a souligné Corinne Payne.

Ces fonds peuvent être utilisés pour financer des sorties éducatives, acheter du matériel scolaire ou organiser des spectacles à l'école, par exemple.

Patrick Poirier, de l'entreprise Boîte blanche, offre en moyenne un montant de 0,75 $ par enfant - ce qui équivaut à 225 $ pour une école de 300 élèves.

M. Poirier n'a pas voulu révéler avec combien d'écoles son entreprise fait affaire, mais il se dit convaincu que tous les établissements scolaires ont adopté ce système. «C'est profondément ancré dans les traditions», a-t-il dit.

Le fonctionnement des ristournes est rigoureusement encadré par plusieurs lois, dont la Loi sur l'instruction publique. L'article 94 stipule que le conseil d'établissement «ne peut solliciter ou recevoir des dons, legs, subventions ou autres contributions auxquels sont rattachées des conditions qui sont incompatibles avec la mission de l'école, notamment des conditions relatives à toute forme de sollicitation de nature commerciale».

«Par exemple, Pepsi ou Coke ne pourrait pas dire: je vais vous faire un don. En échange vous allez mettre une machine à Pepsi ou à Coke dans l'école», a expliqué Yann Bernard, un avocat spécialisé en droit de l'éducation.

Mais dans le cas des photos, c'est l'école qui réclame un service - et non le commerce - et ce dernier n'y rattache aucune condition.

«C'est l'école qui dit: j'ai besoin d'un fournisseur de service de photo et je vais retenir celui qui donne les meilleures conditions à l'école. Ce n'est pas la compagnie de photo qui donne une condition à son don. Ce n'est pas une condition ajoutée à un don», a expliqué l'avocat.

Plus risqué avec les librairies

Cependant, dans le cas des librairies, Me Bernard voit plus de risques par rapport à la loi, même si ce n'est pas une situation de monopole et que les parents ne sont pas obligés de se procurer leurs produits à l'endroit choisi par l'école.

«Si une librairie approchait une école en disant: je suis prête à t'offrir un don qui va varier de 100 $ à 1000 $ à condition que tu incites les parents à venir acheter chez moi, il y a une publicité qui est faite. Et il y a un don qui est conditionnel à cette publicité-là. Là, il y a une sollicitation de nature commerciale», a-t-il soutenu.

Le conseil d'établissement ne peut accepter de don «assorti d'une condition prévoyant que les élèves, leurs parents et, de façon générale, les personnes fréquentant l'école feront l'objet d'une sollicitation de nature commerciale et seront incités à acheter certains produits ou services», selon un document du ministère.

«Peut-être que, à ce moment-là, il faudrait que l'école le dévoile. Mais encore là, est-ce qu'elle aurait le droit?», a dit Me Bernard.