Les enfants d'immigrants sans statut ne pourront pas encore cette année participer à la rentrée scolaire, a dénoncé hier le Collectif éducation sans frontières, qui demande au ministre de l'Éducation de faire ses devoirs.

« C'est l'inertie totale en cette matière. Un à la suite de l'autre, les ministres de l'Éducation n'ont jamais réglé le problème. C'est pourtant simple : on veut que tous les enfants aillent à l'école », a lancé Anne Buisson, du Collectif, lors d'un petit rassemblement à Montréal à la veille de la rentrée scolaire.

Mme Buisson et son collègue Steve Baird ont rappelé que l'éducation est « un droit inaliénable » et que peu importe la situation de leurs parents, les enfants doivent pouvoir prendre le chemin de l'école. Sans documents prouvant leur statut, les parents doivent payer des droits de scolarité de 5657 $ par année, par enfant, au primaire, et de 7075 $ par année au secondaire. Mais ces familles vivent dans la précarité et ne peuvent pas assumer de telles factures, plaide M. Baird.

La mère immigrante de trois jeunes enfants a pris la parole, avec un masque sur le visage par crainte de représailles, pour témoigner de sa situation, qu'elle qualifie de « valse des martyres ».

Après avoir fait une demande de résidence permanente depuis son pays d'origine, Sabrina (prénom fictif) est venue au Québec avec un visa de visiteur en poche.

Une fois le visa expiré, elle est restée et a tenté de convaincre, mais en vain, la commission scolaire du Chemin-du-Roy, à Trois-Rivières, d'accueillir ses enfants. L'année suivante, la Commission scolaire de Montréal a accepté de scolariser gratuitement les enfants pour une seule année. En 2015, Sabrina a changé de territoire et a inscrit ses enfants à la Commission scolaire de la Pointe-de-l'Île, qui leur a ouvert la porte. Au cours des derniers mois, Sabrina a fait une demande d'asile, qui a été acceptée.

DES CENTAINES DE SANS-PAPIERS

Mais pour un dossier qui se règle, il y aurait des centaines sinon des milliers d'enfants sans-papiers qui ne vont pas à l'école. C'est du moins ce qu'indique le Protecteur du citoyen dans son rapport de 2014 en soulignant la grande difficulté d'avoir une évaluation juste du phénomène compte tenu de la clandestinité dans laquelle vivent certaines familles immigrantes sans statut.

Le Protecteur du citoyen recommandait alors au gouvernement de faire preuve d'une certaine souplesse, comme en Ontario et en Colombie-Britannique. Agir autrement constitue « un déni du droit fondamental de ces enfants à l'éducation, qui contrevient à la Convention relative aux droits de l'enfant qu'a ratifiée le gouvernement du Canada et à laquelle le Québec s'est déclaré lié ».

Depuis, le projet de loi 86 est à l'étude à l'Assemblée nationale. Il prévoit élargir le principe de la gratuité scolaire en limitant les exclusions à trois catégories d'élèves non résidents du Québec. Le projet de loi a franchi l'étape de l'étude en commission parlementaire.