Une enquête des autorités québécoises en matière de normes du travail a déterminé que l'Université McGill enfreint la loi en faisant travailler environ 75 employés étudiants à qui elle offre le gite et le couvert, mais aucun salaire, en vertu d'une vieille politique interne de l'établissement.

La nouvelle Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST, autrefois la CSST) a déposé cette semaine à la Cour supérieure une réclamation de 305 000 $ pour salaires impayés à une cinquantaine de « floor fellows », des responsables d'étages de résidences étudiantes. Une autre réclamation a été préparée pour le reste des « floor fellows » qui ont travaillé bénévolement ces dernières années.

La requête précise que malgré une mise en demeure, l'université refuse de payer les heures travaillées.

Considérés bénévoles

McGill accueille environ 3000 étudiants dans ses résidences étudiantes, dont une majorité d'étudiants de première année. Une grande partie d'entre eux vient de l'extérieur du Québec et du Canada.

Les « floor fellows » sont des étudiants chargés d'animer des activités aux résidences, mais aussi de conseiller les logeurs, les guider, les écouter et les diriger vers des services ou des intervenants dont ils pourraient avoir besoin.

« Parfois, on se sent comme si notre emploi durait 24 heures sur 24, parce que nous vivons sur notre lieu de travail », affirme Sadie McInnes, représentante syndicale pour les responsables d'étages qui ont choisi de se syndiquer en 2014.

Les étudiants n'ont jamais été payés pour faire ce travail. Ils sont compensés en bons de repas utilisables sur le campus seulement et peuvent habiter une résidence gratuitement. « Ils étaient considérés comme bénévoles et offraient un service d'encadrement en échange d'une chambre et de repas », a expliqué Vincent Allaire, porte-parole de l'université, en réponse aux questions de La Presse.

Des questionnements depuis 2012

Sadie McInnes raconte que depuis 2012, les « floor fellows » ont commencé à s'interroger sur le soutien reçu de l'université, la gestion des résidences et leur absence de protection lors de litiges avec la direction. « Nous sommes en position précaire : si nous perdons ce travail nous perdons notre logement », dit-elle.

Les responsables d'étages ont donc réussi à obtenir une accréditation syndicale avec l'Alliance de la fonction publique du Canada (AFPC), qui les a aidés à mener leurs démarches pour se faire reconnaître comme de vrais travailleurs et réclamer leur salaire impayé pour les dernières années.

« À la suite de l'enquête de la CNESST, ces étudiants sont considérés comme des salariés en vertu de la Loi sur les normes du travail », a confirmé Geneviève Trudel, porte-parole de l'organisme gouvernemental, à La Presse.

Comme l'université a contesté les réclamations, ce sera à la Cour supérieure de trancher l'affaire. D'ici là, l'unité syndicale nouvellement formée et l'université doivent sous peu entamer un processus d'arbitrage qui permettra d'élaborer une première convention collective pour cette catégorie d'employés étudiants.