Les directions d'écoles secondaires ne devraient pas procéder à des «fouilles à nu» de leurs élèves et laisser plutôt ce travail à la police. Un rapport rendu aujourd'hui veut mettre un point final à une dérive qui a entraîné la démission du ministre de l'Éducation Yves Bolduc, il y a deux mois.

Son successeur, François Blais, rendra public aujourd'hui un document caviardé, les conclusions d'une ex-procureure de la Couronne, Fabienne Bouchard, qui avait eu pour mandat d'enquêter sur les faits survenus le 12 février, dans une école secondaire de Neufchâtel, en banlieue de Québec. Une jeune étudiante de 15 ans avait alors été forcée de se dévêtir, derrière un drap, pour permettre à la direction de l'école de vérifier qu'elle ne détenait pas de stupéfiants sur elle.

Avec les pouvoirs d'un commissaire, Me Bouchard avait aussi le mandat de se pencher sur l'ensemble de la situation et de faire des recommandations générales sur cette procédure. Me Bouchard, à la retraite de la Couronne, avait travaillé pendant douze ans à la Chambre de la jeunesse.

Plusieurs sources ont indiqué à La Presse que le rapport préconisait qu'on mette un terme à cette pratique de la fouille sur les élèves. «Il y a bien des problèmes avec la façon de faire des commissions scolaires», résume-t-on. Dans les semaines suivant le cas de Neufchâtel, il est apparu que de telles fouilles avaient déjà été effectuées, ailleurs au Québec.

Menace de poursuite

Le gouvernement compte rendre publiques des parties importantes du rapport, mais certains éléments seront caviardés. Pour le ministère de la Justice, il fallait faire attention à ne pas porter ombrage au recours juridique éventuel, dans la mesure où les parents de la jeune étudiante de Neufchâtel envisagent toujours de saisir les tribunaux. La jeune fille avait dit s'être sentie humiliée. La famille avait dès lors indiqué qu'elle envisageait une poursuite civile. Des versions contradictoires avaient circulé sur le fait que l'étudiante avait refusé ou s'était vu refuser de téléphoner à ses parents avant que la direction de l'école ne procède à la fouille.

Mis devant les faits, le ministre Bolduc avait affirmé que les «fouilles à nu» étaient permises si elles étaient faites de façon «respectueuse». Ce commentaire lui a valu un torrent de critiques et a accéléré sa démission du conseil des ministres.

Devant le tollé soulevé par l'affaire, le premier ministre Philippe Couillard a demandé que les fouilles cessent, en attendant la tenue d'une enquête.

M. Bolduc avait tiré sa réaction d'un document intitulé «La présence policière dans les établissements d'enseignement».

Cette politique élaborée en 2005, et mise à jour en 2010, confirmait la possibilité pour la direction de procéder à une fouille sur un élève. Nulle part toutefois ne précisait-on une procédure et des limites à ce que l'on pouvait exiger d'un élève.

La politique se référait à un jugement de la Cour suprême. À l'époque, les ministères de la Sécurité publique, de l'Éducation, de la Justice et de la Santé et des Services sociaux, ainsi que des corps policiers et diverses associations scolaires avaient participé à la rédaction du document.

L'enquête de Me Bouchard a rencontré des obstacles. Des directrices d'écoles ont refusé de la rencontrer, craignant de commettre un outrage au tribunal.