Le ministre de l'Éducation, Yves Bolduc, a enjoint hier par voie de communiqué à la Commission scolaire de Montréal (CSDM) de «discuter de bonne foi et [de] cesser immédiatement d'utiliser les élèves à des fins politiques dans le débat administratif concernant le redécoupage des territoires scolaires».

Hier, La Presse faisait état de manifestations d'élèves ces derniers jours dans deux écoles de la CSDM, de même que de l'envoi d'une délégation de 12 élèves, jeudi dernier, à Québec, dans un autobus jaune loué par la CSDM.

Les deux chaînes humaines, l'une dans une école de Notre-Dame-de-Grâce, l'autre dans une école de Westmount, toutes deux affiliées à la CSDM, avaient pour porte-parole des commissaires scolaires qui étaient sur place. L'annonce des deux événements visant à dénoncer le démantèlement en partie de la CSDM a été diffusée par deux employés de la CSDM, par voie de communiqué et par rappel téléphonique.

Sur place, lundi, des élèves de l'école Saint-Luc ont raconté à La Presse avoir été mobilisés par la CSDM, qui leur a dit que l'annexion possible de leur école à la commission scolaire Marguerite-Bourgeoys risquait fort de signifier l'abolition des programmes particuliers (programme international et programme de musique) de leur école ou l'expulsion de certains élèves, qui seraient considérés comme hors territoire.

«Peu importe le scénario retenu, ceux-ci [les élèves] vont continuer de fréquenter leur école. Je demande à la CSDM de cesser de laisser croire le contraire et de plutôt travailler de façon constructive à améliorer l'efficience de notre réseau scolaire», a déclaré le ministre Bolduc.

Guerre politique

De son côté, la Coalition avenir Québec (CAQ) a tenu à réagir.

«J'ai été extrêmement surpris de l'instrumentalisation claire de mineurs dans une joute politique», a réagi Jean-François Roberge, porte-parole de la CAQ en matière d'éducation.

Pour M. Roberge, il n'est pas acceptable «d'utiliser ainsi des jeunes pour qu'ils défendent une guerre politique qui n'est pas la leur».

Ce qui est tout aussi regrettable, à son avis, c'est que la CSDM dise aux jeunes des demi-vérités, la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys disant n'avoir nullement l'intention de mettre la hache dans des programmes existants.

Relevant aussi ce voyage à Québec de 12 jeunes partis la semaine dernière, un jour de classe, pour faire part de leurs doléances à des députés dans un autobus jaune loué par la CSDM, M. Roberge trouve «très inquiétante» cette campagne qui semble sortir tout droit «de la tête d'un faiseur d'images».

«Pas de respect» pour la CSDM

Un membre du personnel de l'une des écoles où il y a eu chaîne humaine (et qui, tout en nous donnant son nom, nous a demandé de le taire dans nos pages) nous a écrit pour nous dire que dans son école, alors que les élèves voulaient dîner tranquillement, l'administration et le personnel, à l'invitation de la CSDM, «ont mis les élèves dehors pour qu'ils aillent manifester».

«Il faut dire qu'il y avait des médias qui attendaient», dit-il.

La CSDM, écrit un membre du personnel, «se sert des conseils des élèves pour mobiliser les écoles. Le personnel administratif et enseignant est inquiet et la machine à rumeurs, très efficace».

On racontait aux jeunes, poursuit l'enseignante, que l'école perdrait son programme particulier, que des jeunes seraient expulsés de l'école parce qu'ils ne seraient plus sur le bon territoire.

«Je n'ai pas de respect pour la CSDM [...] qui se sert des élèves pour alarmer la population.»

En entrevue lundi, Catherine Harel Bourdon, la présidente de la CSDM, assurait que les jeunes s'étaient mobilisés eux-mêmes et que si des commissaires scolaires étaient là, c'était surtout pour des raisons de sécurité et parce que des élèves, mineurs, ne peuvent être considérés comme des porte-parole.

Justifiant le voyage à Québec pendant les heures de classe, Mme Harel Bourdon a mentionné que cela faisait partie du cours d'éducation à la citoyenneté.

Vérificateurs: deux commissions scolaires sous la loupe

Tel qu'il l'avait annoncé plus tôt cet automne, le gouvernement Couillard a procédé à l'envoi de vérificateurs qui ont été chargés d'aller vérifier les livres de deux commissions scolaires.

Des vérificateurs étaient de passage à la Commission scolaire de Montréal (CSDM) ces derniers jours, tandis que d'autres sont passés en novembre à la Commission scolaire des Patriotes. La décision d'envoyer des vérificateurs à la CSDM est survenue après que cette commission scolaire eut refusé en septembre de donner suite à toutes les coupes demandées par Québec.

Pour ce qui est de la Commission scolaire des Patriotes, la décision du ministre Yves Bolduc a été prise après qu'elle eut décidé de mettre fin à son programme d'aide aux devoirs afin de boucler son budget.