Retirée de la grille des matières scolaires il y a plus d'une décennie, l'éducation à la sexualité est en voie de redevenir obligatoire dans les écoles du primaire au secondaire. Un projet-pilote est en gestation au ministère de l'Éducation.

C'est une mesure réclamée depuis déjà quelques années pour, notamment, sensibiliser les jeunes aux agressions sexuelles.

La mise sur pied d'un projet-pilote a été confirmée à des députés lors de séances à huis clos de la commission parlementaire de la culture et de l'éducation, à la fin d'octobre. Cette commission a mené des travaux après le dépôt d'une pétition à l'Assemblée nationale demandant au gouvernement de rétablir les cours d'éducation à la sexualité.

Ces cours ont disparu dans la foulée de la réforme scolaire, avec le retrait du programme de «formation personnelle et sociale». Le ministère de l'Éducation ne veut pas les rétablir tels quels. L'objectif est plutôt d'intégrer quelques heures obligatoires d'éducation à la sexualité dans des matières existantes à chaque niveau du primaire et du secondaire.

Le projet-pilote se ferait dans quelques écoles à la rentrée 2015. Dans son rapport qui sera déposé prochainement à l'Assemblée nationale, la commission parlementaire demandera au ministère de l'Éducation de lui faire un bilan du projet-pilote, ce qui lui permettra de faire des recommandations au gouvernement par la suite.

Le ministère de l'Éducation s'inspire d'autres pays. Selon un document produit pour la commission parlementaire, la Suède, les Pays-Bas et la France «offrent une éducation à la sexualité intégrée au curriculum et basée sur une vision globale et positive de la sexualité humaine. Ces pays sont considérés comme des exemples à suivre en matière d'éducation à la sexualité».

En Ontario, l'éducation à la sexualité est obligatoire de la 1re à la 12e année. Elle est abordée dans le cadre des cours «Éducation physique et santé» et de sciences.

Des sources du milieu scolaire ont indiqué que le ministère avait fait peu de consultations jusqu'ici sur ce projet-pilote. Au cabinet du ministre Yves Bolduc, on confirme que le projet-pilote est en préparation. Mais on ajoute qu'«il y a encore du travail à faire».

Pour l'instigatrice de la pétition, Cathy Tétreault, directrice générale du Centre Cyber-Aide, «il est urgent d'agir». «Notre expérience [sur le] terrain nous démontre hors de tout doute que les jeunes s'informent, forgent leurs perceptions et que celles-ci, malheureusement, sont grandement influencées par le Net. Ces présentations, par le truchement de la pornographie, faussent la réalité et constituent de ce fait des balises inadéquates pour nos jeunes.»

Plan d'action en matière d'agressions sexuelles

De son côté, la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, présentera d'ici mars un plan d'action en matière d'agressions sexuelles. Le plan précédent a pris fin en décembre 2013, mais le gouvernement a reconduit des mesures totalisant 45 millions en attendant que le prochain soit adopté.

«Nous sommes dans une réflexion sur l'aide apportée aux victimes, a affirmé Stéphanie Vallée. Ce n'est pas seulement une question d'indemnisation, mais c'est aussi une question de support et d'assistance. Et nos organismes les CAVAC (Centres d'aide aux victimes d'actes criminels) et les CALACS (Centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel) apportent une aide, mais est-ce qu'on peut faire mieux? Il y a toujours [moyen de] bonifier», a-t-elle affirmé.

Le Regroupement québécois des CALACS demande que leur financement soit augmenté de 5 millions de dollars. Québec leur verse autour de 11 millions par année à l'heure actuelle. «On n'arrive pas à répondre à la demande. Et on espère que le mouvement qu'on voit actuellement amène le gouvernement à s'ouvrir les yeux et à voir que les agressions sexuelles sont un fléau», a affirmé Mélanie Sarroino, agente d'information au Regroupement.