Les mauvaises créances des étudiants dans les quatre universités montréalaises totalisent plus 25 millions depuis 10 ans, selon les chiffres obtenus par La Presse. En cas de non-paiement, les étudiants courent le risque d'avoir affaire à des agences de recouvrement.

Les données fournies par les établissements à La Presse varient d'une université à l'autre et sont donc difficilement comparables, mais elles permettent tout de même de constater que bon nombre d'étudiants ne paient pas leur dû.

À l'Université Concordia, les mauvaises créances sur les droits de scolarité totalisent 12 millions depuis 2005. Chaque année, c'est donc en moyenne 1,3 million que les étudiants ne paient pas à l'établissement anglophone, soit environ 1,67% de tous les droits de scolarité facturés.

À l'Université du Québec à Montréal (UQAM), les mauvaises créances provenant de la facturation des comptes étudiants (droits de scolarité, frais institutionnels, cotisations, assurances et autres) s'élèvent à 2,9 millions depuis trois ans, soit 950 000$ par année. L'an dernier, 1010 étudiants sur 43 000 n'ont pas payé leur dû en entier. Contrairement aux autres universités, l'UQAM n'a pas fourni les données des années 2005 à 2010 à la suite de notre demande d'accès à l'information.

À l'Université de Montréal, on déplore, depuis 2005, 3,9 millions en droits de scolarité impayés, soit 435 000$ en moyenne par année. Ces données comprennent uniquement les comptes «définitivement abandonnés». «Le dossier est fermé lorsque l'agence de recouvrement affirme ne pas être en mesure de recouvrir l'argent», explique le porte-parole Mathieu Filion.

Enfin, les droits de scolarité impayés à l'Université McGill totalisent 4,2 millions depuis 2005 (467 000$ par année en moyenne). À cela s'ajoutent près de 1 million de dollars en prêts non remboursés et un peu plus de 60 000$ en frais de résidence impayés.

L'Université McGill est le seul établissement montréalais où l'on observe une diminution importante des mauvaises créances depuis 10 ans. L'an dernier, les droits et frais impayés totalisaient 267 000$, soit trois fois moins qu'il y a 10 ans. Le nombre d'étudiants fautifs a également chuté à McGill, passant de 1384 en 2005 à 383 l'an dernier.

Selon Ollivier Dyens, premier vice-recteur exécutif adjoint, cette amélioration est due en bonne partie à la bonification du programme d'aide financière de McGill, qui est passé de 10 millions à 25 millions entre 2003 et 2012. «À la fin de l'année, s'il y a des surplus dans l'aide financière, on essaie d'éliminer les dettes de certains étudiants», explique M. Dyens.

McGill a également mis sur pied un système de facturation électronique et mis à jour son site web pour mieux expliquer les conséquences du non-paiement aux étudiants.

Pénalités et intérêts

À Montréal, les étudiants qui ne paient pas leurs droits de scolarité dans les délais prévus se font imposer des pénalités financières et des intérêts sur leur dette. Ils peuvent terminer leur trimestre, mais ils ne peuvent se réinscrire ou obtenir des relevés de notes tant qu'ils n'ont pas payé leur dette.

La vaste majorité des étudiants mauvais payeurs ne se réinscrivent pas, souligne Mathieu Filion, de l'Université de Montréal. «Certains ont abandonné leur session, mais ils l'ont fait après la date limite ou n'ont simplement pas pris la peine d'annuler leurs cours.»

Ailleurs au Canada, certaines universités sont plus sévères: à l'Université de Guelph, en Ontario, les étudiants qui ne paient pas leurs droits et qui ne concluent pas d'entente avec l'administration pour payer en retard sont désinscrits de tous leurs cours.

«Ces politiques de désinscription ne correspondent pas à l'approche que Concordia préconise, souligne la porte-parole Chris Mota. On ne connaît pas les raisons pour lesquelles un étudiant ne peut payer. Est-ce qu'on va mettre un terme à sa carrière académique quatre semaines après le début des cours? Non, ce n'est pas notre approche.»

En dernier recours, les quatre universités montréalaises confient les dossiers des étudiants mauvais payeurs à des agences de recouvrement, des entreprises spécialisées dans la récupération de sommes dues. Ces agences obtiennent généralement un certain pourcentage des sommes qu'elles réussissent à récupérer.

Les universités n'ont pas précisé la proportion d'étudiants étrangers parmi ceux qui n'ont pas payé leurs droits. Cela dit, l'impact financier est plus important lorsqu'un étudiant étranger ne paie pas, car ses droits de scolarité sont en moyenne cinq fois plus élevés que ceux facturés à un étudiant québécois.

- Avec William Leclerc et Serge Laplante

Mauvaises créances

UQAM

(droits de scolarité, frais institutionnels, cotisations aux associations étudiantes, assurances, etc.)

• 2013-2014: 987 399$

• 2011 à 2014: 2,9 millions

Concordia

(droits de scolarité)

• 2013-2014: 1 298 846$

• 2005 à 2014: 12 millions

McGill

(droits de scolarité et frais, prêts, frais de résidence, frais de repas, frais d'imprimerie)

• 2013-2014: 348 192$

• 2005 à 2014: 5,2 millions

Université de Montréal

(droits de scolarité)

• 2013-2014: non représentatif

• 2005 à 2014: 3,9 millions

Droits de scolarité annuels

(1er cycle universitaire, temps plein)

• Étudiants québécois: 2270$

• Étudiants canadiens provenant de l'extérieur du Québec: 6630$

• Étudiants internationaux: 13 000$ à 18 000$