Le ministère de l'Éducation tarde à autoriser le financement pour la construction et l'agrandissement d'écoles, si bien que des commissions scolaires de la région métropolitaine ne pourront construire de nouvelles écoles primaires à temps pour l'an prochain, a appris La Presse.

C'est notamment le cas à Chambly, à Brossard, à Saint-Hubert et à Saint-Amable, sur la Rive-Sud, ainsi qu'à Repentigny, au nord de Montréal, des villes qui attendent des centaines de nouveaux élèves en septembre 2015. Dans certains cas, on pourrait devoir installer des modules temporaires dans les cours d'école.

Les commissions scolaires envoient chaque année une liste de demandes au ministère de l'Éducation pour construire ou agrandir des écoles en fonction des projections démographiques sur leur territoire. En général, le Ministère annonce les projets retenus au mois de mai de l'année suivante.

Or, le changement de gouvernement, en avril, a bouleversé les plans: ce n'est qu'au cours des derniers jours que les premières commissions scolaires ont reçu la réponse du Ministère. Plusieurs autres n'ont encore rien reçu.

Comme il faut au moins 18 mois pour construire une école, les nouvelles écoles demandées l'an dernier ne pourront être prêtes pour la rentrée de 2015.

«Si on a des réponses la semaine prochaine, c'est impossible que ce soit prêt pour septembre 2015, c'est aussi simple que ça», résume Pierre Vocino, directeur de l'organisation scolaire et du transport à la Commission scolaire Marie-Victorin.

En 2013, la Commission scolaire Marie-Victorin, sur la Rive-Sud, a notamment demandé au gouvernement de financer la construction de deux écoles primaires dans des quartiers en plein développement: le secteur C de Brossard (près du Quartier Dix-30) et le Faubourg Cousineau, à Saint-Hubert. Ces deux secteurs accueilleront respectivement 150 et 160 élèves de plus l'an prochain seulement, selon les prévisions souvent conservatrices du ministère de l'Éducation. D'ici cinq ans, on parle de plus de 550 élèves dans chacun de ces deux secteurs.

Le temps presse aussi à la Commission scolaire des Patriotes, sur la Rive-Sud. Elle aurait souhaité inaugurer, en septembre 2015, une nouvelle école primaire à Chambly et une autre à Saint-Amable, où au moins 165 et 85 élèves de plus sont attendus l'an prochain seulement. C'est désormais impossible, selon son directeur général, Joseph Atalla.

«Même si on a une réponse positive du Ministère, ce qu'on espère, on pourrait ouvrir ces écoles-là, dans le meilleur scénario, en janvier 2016», dit-il.

Même incertitude de l'autre côté de l'île, à la Commission scolaire des Affluents. Depuis plus d'un an, cette commission scolaire de la couronne nord cherche un terrain pour faire construire une nouvelle école primaire dans le nord de Repentigny, où quelque 600 nouveaux élèves sont attendus d'ici 3 ans.

Comme l'impasse persiste, la Commission scolaire des Affluents a demandé au Ministère de lui permettre à court terme d'agrandir une école primaire du secteur (l'école Entramis) afin d'accueillir les 200 élèves attendus dès l'an prochain.

Son président, René Labrie, se demande aujourd'hui si l'école pourra être agrandie à temps. «Avant le déclenchement des élections, le gouvernement nous disait qu'on allait recevoir une réponse à la fin du mois de mai. Puis, on nous a dit que la réponse viendrait en juillet. Encore aujourd'hui, nous attendons.

«Malheureusement, le conseil des commissaires risque de devoir prendre des décisions temporaires pour pallier ce retard», conclut René Labrie, faisant référence aux bâtiments modulaires, des classes temporaires installées dans les cours d'école.

Le cabinet du ministre de l'Éducation a adressé nos questions au Ministère, qui n'a pas été en mesure d'y répondre depuis mardi.

Des modules: une solution temporaire

Les écoles ont divers moyens pour accueillir des élèves supplémentaires dans les écoles actuelles, comme transformer des locaux (musique, arts plastiques, bibliothèque) en classes. Il y a toutefois une limite à augmenter la capacité d'accueil à l'intérieur des murs des écoles, et dans plusieurs écoles, cette limite est atteinte.

Pour combler les besoins à Brossard et à Saint-Hubert en attendant la construction de nouvelles écoles, la Commission scolaire Marie-Victorin songe donc à louer des modules, des classes temporaires installées dans les cours d'école.

Pierre Vocino tient à souligner que ces modules sont confortables, climatisés et reliés par des corridors au bâtiment principal.

D'ailleurs, des élèves d'un autre secteur de Brossard (le secteur L) passeront les premiers mois de l'année scolaire en cours dans des modules du genre en attendant que leur nouvelle école primaire, actuellement en construction, soit terminée. Elle devait être prête pour septembre, mais il y a eu des délais bureaucratiques, comme c'est souvent le cas.

La Commission scolaire des Patriotes pourrait aussi se rabattre sur cette solution temporaire. «Il est tôt pour le prévoir, mais c'est absolument une option qu'on considère», dit Joseph Atalla, qui souligne que les écoles des secteurs en besoin sont déjà à «pleine, pleine capacité».

Montréal et Laval: pas de retards envisagés

La Commission scolaire de Montréal (CSDM), la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys (CSMB) et la Commission scolaire de Laval ne prévoient aucun retard pour l'instant: dans les demandes de construction d'écoles envoyées l'an dernier, aucune n'était prévue pour septembre 2015. Fait à noter: la CSDM et la CSMB ont toutes deux reçu la réponse du Ministère à leurs demandes de construction et d'agrandissement d'écoles au cours des derniers jours. La CSMB se dit «très satisfaite» des projets retenus, qui totalisent 50 millions. Ils seront annoncés par le Ministère au cours des prochaines semaines.

Difficile à prévoir

Les commissions scolaires qui prévoyaient ouvrir une nouvelle école en septembre 2015 n'auraient-elles pas pu demander le financement au Ministère plus tôt que l'an dernier? Les besoins sont parfois difficiles à prévoir, répond Joseph Atalla, directeur général de la Commission scolaire des Patriotes. Saint-Amable, donne-t-il en exemple, a connu une forte croissance immobilière qui n'aurait pas pu être prévue par le Ministère. Autre facteur: depuis 2012, la baisse du rapport élèves-enseignant fait pression sur le réseau. Les classes, qui accueillaient autrefois jusqu'à 29 élèves, sont passées à 26 élèves, et à 20 en milieux défavorisés.